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Un point c'est (pas) tout

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Blog sur tout ce qui rend la vie plus chouette...


Critique cinéma : Promising Yong Woman

Publié par Christelle Point sur 6 Juin 2021, 14:53pm

Cassandra Thomas avait tout pour réussir, elle était étudiante en deuxième année de médecine, elle était brillante et plutôt jolie mais tout à coup, elle a tout laissé tomber. Aujourd’hui, à 30 ans, elle vit chez ses parents, travaille comme serveuse dans un coffee shop et passe ses soirées dans les bars ou les clubs. Elle ne se saoule pas, elle fait semblant pour voir combien de types vont tenter de profiter de la situation, ce qui ne manque jamais d’arriver. Ce qui a fait tout basculer, c’est que sa meilleure amie Nina à été violée dans une soirée étudiante et s’est donné la mort ensuite, et depuis ce moment là, la vie de Cassandra n’est tournée que vers une chose, venger (symboliquement ou littéralement) sa mort

Emerald Fennell propose un long métrage parfaitement dans l’air du temps, un film qui évoque dans des termes clairs et sans ambigüité ce qu’est la notion de consentement et qui met en lumière le fléau que représentent aux Etats-Unis les viols sur les campus lors des soirées étudiantes. Son film est particulièrement réussit et dynamique. Elle soigne ses plans, certains même sont particulièrement intéressant en termes de symboles. D’ordinaire, quand un réalisateur ou une réalisatrice utilise la musique pour fortement appuyer ses effets, ça ne saoule un peu. Ici, étrangement, je trouve que cela passe très bien. D’ailleurs le film n’est pas avare en passage musicaux bien choisi, bien calés et bien utilisés pour apporter là de là légèreté quand on commençait à être mal à l’aise, là de la gravité quand on perdait un peu trop de vue le douloureux sujet initial. « Promising Yong Woman » (titre particulièrement bien choisi, alors qu’en revanche l’affiche n’est pas géniale) n’est pas trop long, ne fait pas durer les scènes plus que nécessaire (à part une, terrible, vers la fin mais si elle dure et dure encore, c’est parfaitement justifié), et s’offre même un soupçon d’humour. C’est dans sa forme un film tout à fait réussit, réalisé très proprement par une réalisatrice visiblement soucieuse de bien faire et que l’on sent particulièrement concernée. Carrey Mulligan porte littéralement le film sur ses épaules et elle arrive à composer un personnage complexe et multi facettes, à la fois forte et brisée, à la fois sure d’elle et terriblement fragile. D’une scène à l’autre, d’un regard à l’autre, d’une seconde à l’autre elle nous offre une Cassandra différente et à chaque fois insaisissable. On sent chez ce personnage une cassure qui met du temps à se dessiner : pendant un bon moment on croit que c’est elle qui a été violée, tant ce qui est arrivé l’a dévasté. Elle s’est approprié la souffrance d’une autre et de cette façon, en quelque sorte, elle la rend « universelle ». Je ne connais pas bien cette actrice mais dans ce film, elle est épatante. Les seconds rôles s’en trouve un peu écrasés, même celui tenu par Bo Burnham. C’est un rôle qui apparait longtemps lisse, le petit ami parfait, drôle et respectueux, celui qui va donner à Cassandra l’occasion d’un nouveau départ. Mais la vie ne fait pas ce genre ce cadeau gratis, on aurait tort d’y croire. Il n’est pas mal, Bo Burnman, on lui donnerait presque le bon Dieu sans confession, mais lui aussi à une composition multicouche à livrer. Il s’en sort bien, comme tous les autres rôles de Connie Britton, Jennifer Coolidge ou encore Alison Brie. Je cite beaucoup de rôles féminins car elles sont omniprésentes dans le film, et si les personnages masculins ne sont pas montrés à leur avantage (aucun, finalement…), les personnages féminins ne s’en sortent pas tellement mieux ! Le scénario n’est tendre avec personne, Esmerald Fennell (réalisatrice et scénariste) a trempé sa plume dans l’acide pour l’écrire et personne ne sort indemne de « Promising Yong Woman ». Elle aurait pu proposer un « revenge movie » standard qui embarque le spectateur dans une suite de punitions bien senties et enthousiasmantes mais elle a fait mieux, elle a soigné ses effets et a été audacieuse, plus que je n’espérais. Il y a deux rebondissements dans le film, et si malheureusement je craignais de voir arriver le premier (ce qui n’a pas loupé !), j’ai été complètement cueillie par le second qui est aussi cynique qu’inattendu et qui laisse le spectateur un peu pétrifié sur son siège. Dés lors, on s’imagine une fin totalement noire, cynique et immorale, mais là encore le film vous retourne et on sort de la salle sans savoir si on doit sourire ou pleurer, du coup on fait un peu les deux à la fois. Finalement, le film est presque davantage un film sur la lâcheté et la petitesse que sur le viol et le consentement. Car le scénario le montre bien, hommes ou femmes, il y a toujours un moment où on n’est lâche, vils et égoïste, c’est juste une question de contexte et c’est valable pour tout le monde. Ceux que le mouvement « Metoo » dérange vont lever les yeux au ciel, ils couineront que le film est trop politiquement correct, que « y’en a marre de toutes ces histoires ». On pourrait leur rétorquer que quand on se sent morveux, on se mouche, ça ne peut pas faire de mal. Personnellement, ce sujet du consentement, du viol, du harcèlement de rue (effleuré au passage) me parle comme il parle à beaucoup de femmes. Ce sont donc les garçons que j’encourage à aller voir « Promising Yong Woman », ils verront un film de qualité, bien scénarisé et bien interprété et, pour certains d’entre eux (pas tous, fort heureusement), y trouveront peut-être une occasion de se moucher !

La bande annonce de "Promising Yong Woman"

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