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Un point c'est (pas) tout

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Critique cinéma : Doctor Sleep

Publié par Christelle Point sur 8 Novembre 2019, 08:49am

Danny Torrance est devenu un homme, et depuis l’Hôtel Overlook, il a trouvé le moyen de mettre en sourdine son don, le « Shining ». A coup d’alcool et de drogue dans un premier temps, puis grâce à son travail d’aide soignant dans un hospice. Il ne se sert de son pouvoir que pour apaiser les peurs de vieillards en fin de vie. Un jour, il est contacté (par télépathie évidemment) par Abra, une adolescente qui possède elle aussi le « Shining ». Abra a des visions, elle sait qu’un groupe d’immortels écume les routes pour enlever des enfants comme elle, les assassiner et se nourrir de leur souffrance. Danny replonge pour aider Abra, même si pour cela il lui faut retourner dans ce maudit Hôtel.

« Doctor Sleep », je l’ai lu il y a quelques années et déjà, je trouvais que ça n’était pas le meilleur Stephen King de ma bibliothèque. Je préfère quand King n’abuse pas du surnaturel, ou alors par petites touches. Ecrire une suite à « Shining » n’était sans doute l’idée du siècle, mais adapter cette suite à l’écran, et passer après Kubrick, c’est quasiment suicidaire ! Mike Flanagan s’y est collé, et il propose un film dont la première caractéristique est d’être in-ter-mi-nable : plus de 2h30, avec des scènes qui durent, une introduction qui n’en finit pas, des passages un peu bavards aussi. Quand on est dans une salle pour plus de 2h30, on a intérêt à être devant un chef d’oeuvre ou alors on trouve le temps horriblement long. Pour avoir une petite chance d’exister par lui-même, le film aurait sans doute du faire table rase du film de Kubrick. Mais l’ombre du géant est trop forte et Flanagan n’avait pas les épaules pour résister à l’attraction. Il lui emprunte des dizaines de plans, l’intégralité de son décor de l’Overlook Hôtel (au passage, les décorateurs sont les vrais héros de « Doctor Sleep » et je leur tire mon chapeau), il lui emprunte même sa fameuse ligne musicale du générique de début. Et puis, cerise sur le gâteau, il se sent obligé de filmer des scènes où apparait le fantôme du père de Danny. Comme évidemment il ne peut pas le faire incarner par Jack Nicholson (encore que, avec la technologie actuelle, ça aurait peut-être été possible, avec l’accord de l’acteur), il lui substitue un sosie ! Le pauvre fait de son mieux, il est filmé de profil pour faire illusion mais ça ne fonctionne pas, et dans la salle on est partagé entre un vague malaise et un sourire ironique ! Si on ajoute à tout cela une musique à base de battements de cœur pas forcément heureuse et des effets spéciaux qui flirtent avec le grotesque, on a un bien vilain tableau de « Doctor Sleep » ! Mais Mike Flanagan n’est pas le seul responsable de ce film techniquement très imparfait (pour rester positive). Le problème, c’est qu’adapter Stephen King est un défi très rarement réussi. Les bonnes adaptations de l’écrivain tiennent sur les doigts d’une seule main. Le surnaturel chez King fonctionne à l’écrit par la magie des mots, mais les images le trahissent (presque) toujours. Pourquoi les meilleures adaptations sont celles qui en font le moins de ce point de vue, de « Misery » à « Christine » en passant par « La Ligne verte » ou « Carrie » ? On peut presque tout gober chez King à l’écrit, mais dés qu’il faut le mettre en image, comme ici, c’est ridicule. Alors, partant de ce postulat, il faut beaucoup de talent aux acteurs pour évoluer dans cet univers en étant crédible. Même si les seconds rôles sont bien incarnés, par Cliff Curtis ou Kyliegh Curran par exemple, on va plutôt se focaliser sur Ewan McGregor et Rebecca Ferguson. L’un comme l’autre font très bien le job, je trouve, dans le contexte qui est celui du film. Rebecca Ferguson notamment, qui n’est pas loin avec son rôle de méchante très méchante, de voler la vedette à Obiw… Ewan McGregor. Le scénario, sans trop en dire, manipule un concept éternel chez Stephen King, la lutte du Bien contre le Mal. Si le film de Kubrick déplait tellement à l’auteur, c’est pour plein de raisons mais aussi pour celle-ci, dans « Shining » cette lutte est éludée, écrasée, écrabouillée, par le charisme et la personnalité de Jack Nicholson. Le vrai héros de « Shining » était Danny, et ce don qui l’effraie tellement et qu’il doit apprivoiser, pour ensuite l’utiliser à bon escient. Là, pour le coup, c’est au centre du sujet de « Doctor Sleep ». Danny refuse un don qui lui apparait comme une malédiction avant de comprendre qu’il peut, qu’il doit en user pour vaincre le « Nœud Vrai ». Cette pseudo secte composé d’immortels (ou presque) se nourrit du « Shining » et passe son temps à écumer les routes pour trouver des gamins à sacrifier. C’est une revisite du mythe du vampire, ni plus ni moins. Le duel final, dans l’Hôtel délabré, est présenté comme un règlement de compte de Danny avec son passé (la scène du bar, miroir de celle du film de Kubrick) en même temps qu’une lutte à mort entre le Shining et ses prédateurs. C’est un ressort de fiction éculé, mais c’est celui du livre, alors il était difficile pour le film d’y échapper ! D’après mes souvenirs du roman, le scénario est d’une grande fidélité. Autant Kubrick à dénaturé « Shining », autant Flanagan aura respecté « Doctor Sleep » quasiment à la lettre. En résumé, pour apprécier « Doctor Sleep », il faut petit a) être un immense fan du roman, petit b) d’une indulgence totale avec le cinéma formaté, et petit c) ne pas être allergique aux effets spéciaux qui font rire au lieu de faire peur ! Dans le cas contraire, on peut légitimement se contenter du roman éponyme. King, on peut tourner le truc dans tous les sens, c’est surtout fait pour être lu !

La bande annonce de "Doctor Sleep"

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