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Un point c'est (pas) tout

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Le coin des livres : Le Fils du Père

Publié par Christelle Point sur 19 Avril 2024, 15:34pm

Diego, professeur d’université avec une bonne réputation et une vie bien établie, a enlevé l’infirmier en charge de sa sœur handicapée à Barcelone, lui a fait traversé toute l’Espagne dans le coffre de sa voiture jusqu’en Estrémadure pour finalement lui coller trois balles dans la tête dans la maison familiale, le tout sans donner d’explication à la police. Sur le point d’être jugé, il raconte par écrit comment, depuis trois générations, les hommes de sa famille sont cernés par la violence et poursuivis par une forme de fatalité qui se confond avec l’histoire fratricide de l’Espagne du XXème siècle.

« Le Fils du Père » (titre et photo de couverture magnifiques), le roman de Victor Del Arbol est indéniablement un roman noir ambitieux. Il est ambitieux en cela qu’il ne se contente pas de dérouler une histoire de crime en nous dévoilant sa gestation, ses motivations et ses conséquences au fil des chapitres. « Le Fils du Père » (Jésus ou Satan, selon l’angle sous lequel on regarde) épouse l’histoire tourmentée de l’Espagne à compter de 1936, date de la fin de la guerre Civile et du début de la dictature fasciste de Franco. Le roman raconte trois générations d’hommes d’une même famille, tous pétris d’une histoire violente et d’un machisme mal digéré. Le grand-père Simon, homme de main des phalangistes et volontaire pour aller combattre sur le front de l’est aux côtés de la Wehrmacht, fait prisonnier par l’Armée Rouge, est revenu plus ou moins traumatisé de Russie. Son fils (le père, donc), qui a grandi sans père, a versé dans la violence à son tour a été engagé (plus ou moins volontaire) en Afrique du Nord. Lui est un homme dur, dur avec son épouse, sans tendresse pour ses enfants et (peut-être) incestueux avec sa jeune fille. Et puis le fils, Diego, qui a toutes les apparences de celui qui évite la violence et la pauvreté par son éducation et qui est malgré tout rattrapé par elle sur le tard, inexorablement. Son crime, objet central du roman, on en découvre assez vite les tenants et les aboutissants, il suffit de quelques pages au sujet de sa victime. Diego ne s’explique pas devant ses juges, il se sait déjà condamné, il n’a pas de fils, la « malédiction » s’arrêtera avec lui. Le roman n’est pas forcément facile à lire si on ne connaît pas un minimum l’histoire de l’Espagne car Victor Del Arbol, à qui elle est sûrement très familière, n’explique pas réellement les faits historiques évoqués. Cela dit j’ai appris des choses sur l’engagement de troupes franquistes sur le front russe, par exemple, ce que j’ignorais totalement. Là où le roman est aussi un peu ardu à suivre, c’est par son côté « éclaté » : trois personnages principaux, on passe de l’un à l’autre sans cesse avec une chronologie totalement éclatée elle aussi. C’est donc une lecture exigeante pour un roman noir qui n’en est pas vraiment un. A la fois polar, chronique familiale, roman choral, fresque historique et politique, « le Fils du Père » en dit long sur l’Espagne du franquisme et sur les séquelles que la Guerre Civile et la dictature ont laissées dans la société espagnole autant que dans les psychés.

 

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