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Tout allait bien dans la vie de Paul, marié et père d’une petite fille. Quelques soucis d’argent, mais rien de grave. Et puis, un jour, alors qu’il se baigne dans l’océan, il est témoin d’un phénomène météorologique étrange. Dans les jours qui suivent, il s’aperçoit qu’il rétrécit. De quelques centimètres chaque jour, il devient de plus en plus petit sous les yeux désemparé de sa famille et la circonspection de la médecine moderne. Bientôt, il ne pourra plus sortir et tout deviendra compliqué… et dangereux.
« L’Homme qui Rétrécit » est au départ un roman (épatant) de Richard Matheson qui a déjà fait l’objet d’une adaptation il y a longtemps, aux Etats-Unis. En transposant ce même sujet dans la France de 2015, Jan Kounen peut offrir à cette fable métaphysique le savoir faire d’aujourd’hui. « L’Homme qui Rétrécit » c’est d’abord un défi technique. Le film est parfaitement réalisé. Toute la première partie, qui couvre environ un tiers du récit, est une sorte de drame familial. Devant la « maladie » incompréhensible de Paul, la médecine est impuissante et son couple se délite. Dans cette première partie le défit est de rétrécir Jean Dujardin jusqu’à le faire intégrer la maison de poupée de sa fille. Mais ensuite, lorsqu’il échoue à la cave par accident, le long métrage devient un film d’aventure tendance horrifique. Là, dans seconde partie, il faut tirer un grand coup de chapeaux aux accessoiristes, aux décorateurs, aux costumiers, aux maquilleurs et aux responsables des effets spéciaux et qui font ici un travail remarquable. Suggérer le danger, utiliser le hors champs, la contre plongée, tout est pensé pour rendre l’aventure de Paul épique, émouvante, terrifiante et même par moment, poétique. La musique est très présente mais plutôt agréable. La seule chose qui m’a un peu perturbé, c’est la voix off. Je ne sais pas si j’aurais fait ce choix, car elle est quand même assez présente et cela peut vite devenir envahissant et même un peu contre productif. Mais c’est un détail car franchement, visuellement le film est étourdissant. Et puis Kounen se fait plaisir, avec la scène d’ouverture dans l’espace, l’omniprésence jamais explicité des « ronds » ou cette scène magnifique avec le papillon ou celle avec le poisson rouge. Jean Dujardin porte le film sur ses (de plus en plus petites) épaules. Dujardin n’a plus grand chose à prouver depuis longtemps dans le cinéma français mais ici, c’est un rôle hyper physique qu’il doit endosser. Père et mari désemparé dans un premier temps, puis aventurier de l’infiniment petit, sorte de Robinson Crusoe de sa propre cave dans un second, il campe un homme moderne contraint de revenir à ses instincts primaires. Comme dans Tom Hanks dans « Seul au Monde », il doit chercher à se soigner, se nourrir, se vêtir, combattre la solitude et les dangers. Combatif, résigné, inventif, il doit mener un combat intérieur pour accepter son sort étrange : Jean Dujardin est tout à fait à son affaire ici. Marie-José Croze et la petite Daphné Richard s’en sorte avec les honneurs, mais elles disparaissent assez logiquement au bout de 40 minutes de film. Fidèle au roman, tout du moins dans l’esprit, « L’Homme qui Rétrécit » est une sorte de conte métaphysique sur la fragilité de la vie et la relativité des choses. Rien de bien révolutionnaire évidemment, mais des questions essentielles. Nous sommes peu de choses face à l’immensité de l’univers et de l’inconnu, nous ne sommes que des minuscules poussières et Jean Dujardin, dans sa cave, rétrécissant jusqu’à devenir une simple molécule (je crois me souvenir que c’est ainsi que se termine le roman), n’est que la métaphore de cette évidence. Le scénario s’attache à une certaine crédibilité (comment se nourrir, s’habiller, se chausser, se laver quand on devient de plus en plus petit ?) en prenant soin de faire rétrécir Paul de scène en scène. Le combat avec son chat est cruel, celui avec cette araignée qu’il aurait mieux fait de tuer au début du film est terrifiante. Là, avec cette araignée géante je trouve mes limites de spectatrice, j’ai quitté l’écran des yeux, trop terrifiée. Comme le roman, aucune explication du phénomène n’est même proposée. : Il était une fois un type qui rétrécissait, et il n’y a rien d’autre à expliquer. C’est frustrant mais de toute façon, quelle explication pourrait-on bien trouver ? L’acceptation de son nouvel état, la résignation après l’incompréhension, la colère puis le désespoir, c’est comme si cet homme faisait le deuil de sa condition d’homme. « L’Homme qui Rétrécit » est un film qui doit être vu sur grand écran, avec le son qui va avec (la cavalcade de l’araignée hors champs, quelle angoisse !), et qui mérite d’être vu tout court. Le cinéma français ose des choses de plus en plus audacieuses, encourageons-le dans cette voie.