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Un point c'est (pas) tout

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Critique cinéma : Black Dog

Publié par Christelle Point sur 23 Mars 2025, 16:02pm

Fraichement libéré de prison, Lang revient dans sa ville natale, aux confins du désert de Gobi. Rien ou presque ne l’attend dans cette cité industrielle à l’abandon, son père alcoolique n’est que l’ombre de lui-même, il n’a pas un billet en poche et l’oncle de celui dont il a causé la mort lui tourne autour. Engagé dans une brigade chargée de débarrasser la ville des chiens errants qui pullulent, Lang va faire la rencontre qui va tout changer, celle d’un chien noir particulièrement agressif que tout le monde recherche, le croyant enragé.

Primé à Cannes, le long métrage du chinois Hu Guan nous emporte dans une Chine rurale rarement filmée par le cinéma. Ce qui saute aux yeux immédiatement, presque dans la toute première scène, ce sont les décors de « Black Dog », c’est le désert de Gobi, à quelques encablures de la ville natale de Yuan, un désert de pierre, de rocailles et de falaises à perte de vue, aussi beau qu’il en est inquiétant. Et puis la ville natale de Lang, une ville pétrolière de l’Ouest de la Chine en grande partie laissé à l’abandon (d’où le problème des chiens errants, redevenus sauvages). Cette ville a connu son heure de gloire, aujourd’hui l’industrie l’a déserté et il ne reste que de grands ensemble vidés, délabrés, un paysage de fin du monde. Même le zoo a été à moitié vide, à l’exception d’un tigre de Manchourie dont les autorités ne savent trop que faire. Bon nombre de scènes fortes du film de dérouleront dans ces paysages vides, envahies par les chiens. Les scènes avec les meutes de chiens sont particulièrement bien filmées, et j’imagine de tourner avec des cohortes pareilles ne doit pas être facile. Le film est très peu dialogué (le personnage principal doit prononcer 10 mots en tout et pour tout !), et il dure presque deux heures. Dit comme cela on s’imagine des scènes qui s’étirent et un film qui flirte avec l’ennui. Mais non, même si je lui accorde quelques toutes petites longueurs, même si faute de dialogues, on ne peut pas dire que l’on comprend tous les enjeux, ça ne pose pas un problème insurmontable. On devine bribes par bribes les relations entre les personnages, le passé de Lang (la musique, la petite célébrité, l’homicide) mais peu importe car on comprend facilement l’essentiel : la relation qui se joue entre deux âme solitaire : Lang et le lévrier noir. La musique est sympathique et ça me fait plaisir d’entendre à plusieurs reprises « Hey You » des Pink Floyd, une chanson que j’aime bien et qui n’est pas très connue (album « The Wall », pour ceux que ça intéresse), elle colle merveilleusement au film. Le personnage de Lang est incarné par un acteur nommé Eddie Peng. Comme je l’ai dit il doit prononcer 10 mots à tout casser (et aucun dans les 20 premières minutes, à tel point que je l’ai cru muet !). Il compose un personnage mutique et solitaire, peut-être brisé par la prison (que sait-on vraiment des conditions d’incarcération en Chine ?) et qui revient dans sa ville sans réel but, sinon celui de retrouver un sens à son existence. Le duo qu’il forme avec le chien (jamais baptisé, on va donc l’appeler le chien) n’est pas immédiatement harmonieux, il est mordu à plusieurs reprises. Mais ils sont pareils tous les deux, et ils le sentent tous les deux : deux sauvages qui mordent de peur d’être mordus. Cette relation est très belle, très touchante, à tel point qu’on a le cœur qui se serre lorsqu’ils sont séparés. Le scénario de « Black Dog » est une digression sur la notion de Liberté car il n’est finalement question que de cela. Les chiens sont redevenus libres et sauvages et le pouvoir ne cherchent qu’à les capturer et les mettre en cage. Lang recouvre la liberté mais il est sans cesse renvoyé dans une cage, celle que lui imposent les policiers qui lui interdisent de sortir de la ville, celle que lui impose l’oncle de sa victime, qui à plusieurs reprises le coince pour le faire payer. Le père de Lang est prisonnier de l’alcool. Les animaux sont en cage : le tigre dans le zoo, les serpents dans la ferme à serpent (morale : attention aux séismes quand on dirige une ferme à serpent !). Et cette ville à moitié vide, mais dans laquelle le haut parleur distille à tout bout de champs des consignes qui ressemblent à des ordres, c’est quelque chose qui nous est tellement inconnu et qui fait qu’on se sent enfermé, même dehors. Il n’y a que le cirque qui représente une certaine idée de la Liberté dans le monde de Lang, mais il n’est que de passage.  Mais la Liberté, au final, tous vont la trouver ou la conquérir, d’une manière où d’une autre, c’est le message final et optimiste de « Black Dog », et dans un pays comme la Chine c’est un message bien plus fort qu’ailleurs. Ode à la Liberté, film très poétique (sans être lyrique ou grandiloquent) et magnifiquement filmé, « Black Dog » est un film qui en dit plus long sur la Chine moderne que bien des reportages ou compte rendus journalistiques. : je le dis souvent, rien ne vaut la fiction.

La bande annonce de "Black Dog"

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