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Il est vendeur en téléphonie mobile à Paris, il vivote entre ce job sans grand intérêt et Marion, cette femme du monde plus âgée que lui, mariée et avec qui il vit une histoire clandestine. Sa mère est morte il y a longtemps et il n’a plus réellement de contact avec son père qui habite dans le Puy de Dôme. Lorsqu’il reçoit un coup de téléphone lui apprenant que son père est mort d’une hémorragie cérébrale dans son agence bancaire, il prend le train pour aller organiser les obsèques et débarrasser la maison de son enfance avant de la mettre en vente. C’est en descendant dans la cave que sa vie bascule dans l’irrationnel.
Le tout petit roman d’Alexandre Postel (à peine 120 pages) raconte, sur 5 jours, le basculement vers l’horreur d’un jeune homme qui n’est jamais nommé. Le récit est raconté à la première personne et se déroule du 30 avril (jour de l’annonce de la mort du père) au 5 mai (jour où son destin se scelle pour le pire). Le récit est fait entièrement en flash back, c'est-à-dire que ce jeune homme raconte (à son psy ? A son avocat ?) ce qui s’est passé avec ses mots à lui, et il essaie d’expliquer l’inexplicable. La force de ce récit, c’est indéniablement la première personne. La même histoire racontée autrement n’aurait pas la même force et surtout on comprendrait encore moins ce pauvre bougre qui ne fait qu’enchainer les mauvaises décisions et les comportements erratiques. Sans trop en dire, on peut quand même préciser que dans la cave de son père, il trouve quelque chose d’abominable, de criminel. Alors qu’il pourrait sauter sur son téléphone et prévenir la police, il cède à la panique d’être incriminé « il faudra un coupable, et ce sera moi puisque mon père et mort, ils vont me coller cela sur le dos, jamais ils ne croiront que je ne savais rien ». Mais la peur est très mauvaise conseillère, à chaque fois qu’il a l’occasion de se sauver, il fait de mauvais choix, il avale trop de somnifères, il boit plus que de raison, il va trainer dans les bars louches de Clermont Ferrand pour s’abrutir et ne plus penser. En tant que lecteur, tout cela est à la fois incompréhensible et déconcertant, comme si ce jeune homme épousait inconsciemment le crime de son père, comme si le sang qui coule dans ses veines était maudit et que rien ne pouvait empêcher qu’il « devienne son père ». Je ne sais pas si la démonstration est ultra convaincante pour tout dire, ce qui reste du livre une fois refermé, c’est une incompréhension qui n’aura jamais été réellement dissipée. On n’arrive pas à être en empathie avec ce type, en dépit du désarroi compréhensible qui est le sien. Et d’ailleurs, on comprend mal les tenants et les aboutissants de sa relation avec Marion, qui semble anecdotique au départ mais qui s’avèrera cruciale pour le dénouement. La fin est assez morale, puisqu’il a épousé le destin paternel, il en épousera les conséquences. Ce roman a été adapté au cinéma au début de cette année sous le titre « Le Successeur », c’est d’ailleurs ce film qui ma poussé vers le roman d’Alexandre Postel. Le film a fait pas mal d’entorses au roman littéraire sur le crime lui-même et sur la fin (très différente). Mais l’esprit reste le même, celui d’un homme poussé au crime par ses gènes, en quelque sorte. Pas désagréable à lire, court et bien écrit, « L’Ascendant » laisse dans son sillage un vague sentiment de malaise. Si c’était l’objectif de l’auteur, c’est réussi !