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Un point c'est (pas) tout

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Le coin des livres : Le Bal des Folles

Publié par Christelle Point sur 15 Août 2023, 15:03pm

A la fin du XIXème siècle à Paris, l’hôpital de la Pitié Salpêtrière était un asile pour aliénées où œuvrait le fameux docteur Charcot. Lui prétendait étudier et soigner les psychotiques, les hystériques, les mélancoliques ou les handicapées mentale. En réalité, cet asile était l’endroit où on enfermait celles qu’on ne voulait plus avoir sous les yeux : les prostituées, les victimes de viol, les veuves dépressives, les belles-filles encombrantes, les épouses dont on voulait se débarrasser, les filles que l’on répudiait. Eugénie Cléry, qui depuis sa tendre enfance voit et entends les esprits des défunts, est internée à la demande son père qui la pense folle. Eugénie n’es t pas plus folle que la majorité des femmes internée, et elle attire immédiatement l’attention de Geneviève, l’infirmière en chef.

« Le bal des folles » est le premier roman de Victoria Mas, et pour un premier roman, c’est « prix Renaudot des lycéens» et adaptation cinéma ! Le roman est court, facile et agréable à lire malgré la lourdeur infinie du sujet. Elle nous immerge dans un asile, à la fin du siècle peut-être le plus misogyne de l’Histoire de France et on fait la connaissance de Louise, une adolescente orpheline internée car traumatisée par le viol qu’elle a subit de la part de son oncle. Elle est amoureuse d’un médecin qui profite de sa faiblesse d’une façon ignoble. On suit Thérèse, vieille prostituée qui a assassiné son souteneur et qui règne sur le petit monde des filles en leur tricotant des châles toute la journée. On apprend à connaitre Geneviève, infirmière dévouée et sèche, qui n’a jamais fait le deuil de sa petite sœur. On y côtoie Charcot et son équipe, avec ses méthodes certes révolutionnaires pour l’époque, mais dénuée d’éthique, de compassion et surtout d’efficacité. On y apprend que tous les ans à la mi-carême, un grand bal était organisé où le tout Paris venait reluquer les aliénées, maquillées et déguisées pour l’occasion. On reste assez interdit aujourd’hui, à la lecture du roman de Victoria Mas (très bien documenté et sur un sujet très mal connu car bien peu étudié), par la facilité avec laquelle on se retrouvait enfermée parmi les folles, soustraite au regard d’une société ultra patriarcale et (pléonasme) inhumaine. Le personnage central, c’est Eugénie Cléry. C’est par elle que la petite touche de surnaturel débarque dans le roman. Elle est médium, elle n’y peut rien, elle voit et entends les défunts. Parce qu’elle à osé s’en ouvrir à quelqu’un en qui elle croyait avoir confiance, la voilà internée. Ses origines bourgeoise ne l’ont pas épargné, au contraire, elle indispose son père : à l’asile ! Mais ce qui l’a amené à l’asile pourrait bien s’avérer une clef pour en sortir… Le roman nous immerge dans la grande mode du spiritisme qui était à l’œuvre dans le tout Paris de cette période (et qui ne fait que commencer en 1885) : les écrits d’Allan Kardec se distribuent sous le manteau, dans le secret des salons bourgeois on fait tourner les guéridons. L a pauvre Eugénie avoue son don trop tôt, une vingtaine d’année plus tard et elle aurait été la star du Tout-Paris. Le roman est très réussi, bluffant même pour un premier roman, et quelle audace de choisir un sujet pareil ! Je me permets de conseiller également l’adaptation cinéma du roman, très fidèle et qui m’avait carrément donné envie de découvrir le livre. Cela ne m’a pas permis de me laisser surprendre par la cruelle ironie de la fin, elle aussi fort réussie, mais qu’importe, cette lecture est passionnante et bouleversante.

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