/image%2F0902697%2F20220925%2Fob_49edff_don-t-worry-darling.jpg)
Alice et son jeune époux Jack vivent, au cœur des 50’s, quelque part dans une communauté isolée et totalement repliée sur elle-même. Alice et son mari Jack vivent insouciants, Jack gagne bien sa vie dans un travail dont il ne doit rien dire. Il fait toujours beau, et la société Victory, qui pourvoie aux besoins de la communauté, s’occupe absolument de tout, avec une seule obligation pour mesdames : ne rien chercher à savoir du travail de leur mari et ne jamais sortir de la communauté. Mais depuis quelque temps Alice se sent bizarre, elle a des hallucinations, des absences et des petits détails étranges viennent enrayer sa vie bien rangée. Un jour, intriguée par un avion dans le ciel qui semble d’être écrasé, elle cherche à s’éloigner de la petite ville et découvre un endroit étrange.
Olivia Wilde passe derrière la caméra pour nous offrir un film assez dérangeant, et, je dois l’avouer, peu évident à lire. La première chose que l’on peut dire, c’est que du point de vue de sa forme, le film est très soigné. Il y a beaucoup de choses que j’ai aimé dans « Don’t Worry Darling » : les décors délicieusement 50’s, les costumes, la lumière écrasante du désert, la musique aussi. La bande originale du film mêle des morceaux des 50’s avec une musique originale intéressante, plutôt bien utilisée bien que parfois un peu envahissante, notamment dans la scène finale. Olivia Wilde a voulu soigner ses plans, multipliant les scènes à l’esthétique recherchée, à défaut d’être compréhensibles. Par exemple, elle multiplie les plans fugaces très décalées, comme des scènes de ballet ou très gros plans de nourriture. On se doute qu’il s’agit de petit flash hallucinatoires d’Alice, mais ils sont impossibles à décrypter tant que l’on n’a pas compris où le film veut nous emmener. Beaucoup de plans jouent sur la symétrie, l’ordre, l’harmonie, et là par contre, c’est totalement dans l’esprit du film. Ils sont là pour souligner en permanence que dans la petite communauté fermée de Victory, ce qui importe par-dessus, c’est l’ordre, l’harmonie, la routine rassurante. C’est presque un mantra, et beaucoup de plans de « Don’t Worry Darling » viennent appuyer, presque en permanence, ce mantra. Bien entendu il y a quelques défauts, des scènes inutiles, trop longues, trop larmoyantes ou geignardes (la pauvre Alice pleure beaucoup) qui peuvent agacer. Mais Olivia Wilde réussi à maintenir l’intérêt et le suspense sur le « pourquoi du comment » presque jusqu’au bout. Pour créer du malaise, il ne faut que quelques petits détails inexplicables, et le film les distille intelligemment. Dans l’ensemble, le film est techniquement soigné, presque appliqué et réussi. Il n’y a pas grand-chose à redire sur le casting, à commencer par Florence Pugh, très bien dans un rôle assez difficile de femme de plus en plus perdue, déstabilisée : d’abord intriguée, puis inquiète, puis angoissée pour finir en crise de panique. Elle parvient bien à rendre cette graduation dans la peur. A ses côtés, Chris Pine, Harry Styles et Olivia Wilde, entre autres, font le job, eux aussi toujours un peu sur la ligne de crête, suffisamment ambigus pour qu’on doute toujours un peu de leur intention. Chris Pine notamment, met particulièrement mal à l’aise avec son regard insondable. L’intérêt du scénario est double : d’abord découvrir le secret de cette petite communauté ultra fermée. Sur ce point, on se perd en conjecture pendant un bon moment : expérience scientifique, projet parapsychologique de la CIA, mouvement sectaire, on passe par toutes les explications possibles jusqu’à ce que, au travers d’une scène clef 20 minutes avant la fin, tout bascule là où, personnellement, je ne l’avais pas vu venir. Cette scène tombe sans prévenir, au début on ne comprend pas ce qui se passe et ce n’est que bien plus tard que le puzzle se met en ordre. C’est assez rare de réussir une déstabilisation aussi nette dans un film, même un film de genre. Il y a quand même le risque que certains spectateurs se sentent floués par ce rebondissement, qu’ils le trouvent improbable, tiré par les cheveux ou ridicule, je peux très bien comprendre qu’il ne plaise pas à tout le monde. Le second intérêt du scénario, c’est de comprendre ce que sous-entend ce projet Victory, comment il faut le comprendre. J’ai mon interprétation, je ne sais pas si c’est la bonne car le film, je le répète, n’est pas ultra lisible. Sans rien dévoiler, j’y vois personnellement une critique assez virulente du machisme et du patriarcat, une critique que je trouve pour ma part assez pertinente et réussie. Les 50’s, cette époque où les femmes ne travaillaient pas, n’avaient à se préoccuper que de leur toilette et de leur shopping, du soin de leur intérieur et du soin de leur mari, qui leur préparait un verre de whisky à leur retour du travail et se laissaient trousser dans leur jolie robe juste avant le repas, cette époque est révolue. Aucune femme moderne ne la regrette, et « Dont’ Worry Darling » est un film qui est là pour le rappeler.