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Un film de zombies de série Z, à très petit budget et dirigé par un réalisateur caractériel tourne mal lorsque de véritables zombies attaquent l’équipe de tournage.
Impossible de réellement résumer le nouveau film de Michel Hazanavicius sans trop en dire. Ce film est une sorte d’OFNI, « Objet Filmé Non Identifié » qui, c’est certain, n’est pas destiné à plaire au plus grand nombre. Initialement intitulé « Z » puis renommé à la dernière minute pour les raison géopolitiques que l’on sait, « Coupez ! » est le remake d’un film japonais que je ne connais pas (mais qu’un des personnages visionne pendant le film, si on a l’œil). Le film d’Hazanavicius se décompose en 3 parties. La première est totalement déroutante : le tournage d’un film de zombie dérape lorsque des vrais zombies s’attaquent à l’équipe de tournage. Ces 30 premières minutes sont volontairement navrantes, tout est surjoué, mal cadré, les gags sont mauvais, la musique est dissonante, la caméra à l’épaule est hyper saccadée, les effets spéciaux ridicules et les acteurs totalement à côté de la plaque en permanence. Mais il ne faut pas faire comme les quelques personnes qui ont quitté la salle à ce moment là, c’est évidemment très mauvais puisque c’est une série Z (il y a des gens qui sont décidément hermétique au second degré !). Il faut serrer les dents devant ce cinéma volontairement très mauvais et attendre la suite, elle le mérite. La seconde partie est un long flash back qui montre la longue et laborieuse préparation du film. Hazanavicius met en scène un réalisateur assez médiocre (Romain Duris, formidable) qui accepte de se charger du remake d’un film japonais particulier : il s’agit d’un long plan séquence de 30 minutes diffusé sur le web en direct. Il auditionne des acteurs dont un est particulièrement pénible (pour ne pas dire autre chose) en voulant se mêler de tout et en trouvant à redire sur tout. Finnegan Oldfield a la lourde tâche de s’autoparodier, lui qui a souvent été cantonné aux rôles sérieux. Il donne corps à un acteur qui se sait « nouvelle coqueluche du cinéma français » et à qui cela est sérieusement monté à la tête. La femme du réalisateur (Bérénice Bejo) a été actrice mais elle ne l’est plus pour des questions d’assurance (elle prenait ses rôles beaucoup trop à cœur) mais va être obligée de rempiler in extremis, pour le meilleur et/ou pour le pire. J’adore Bérénice Bejo et je l’adore ici dans un rôle où elle passe du tout au tout en 10 secondes. Il y a aussi de chouettes seconds rôles tenus par Denis Ménochet (acteur alcoolique en sevrage imparfait), Raphaël Quénard, Sébastien Chassagne et Matilda Lutz. Je fais une mention spéciale à Jean-Pascal Zadi en compositeur de musique de film dépassé et fataliste. Toute cette seconde partie, qui dure à peu près une heure n’est en réalité que la mise en bouche de la dernière partie, la dernière demi-heure : la meilleure. On revoit alors les mêmes 30 premières minutes du début mais derrière la caméra et c’est très drôle, et en même temps légèrement angoissant... « Coupez ! » est une sorte de déclaration d’amour (sous hallucinogènes) au cinéma, au bricolage des séries Z, aux films à très petits budgets. C’est sur que ce n’est pas un film qui fait dans la dentelle, les gags sont parfois un peu limites, les personnages sont sans grande nuance, tout le monde n’y trouvera pas son compte. On pourrait croire qu’on est dans une parodie mais ce n’est même pas encore ça, c’est autre chose : un film sur le tournage d’un film sur le tournage d’un film, une sorte de poupée russe cinématographique. Hazanavicius fait donc 30 premières minutes très mauvaises pour en faire ensuite 90 maîtrisées, réussies et très drôles. Il faut adhérer au principe de départ pour aimer ce film comme il le mérite et passer un bon moment. On peut surement lui reprocher des choses, des petits détails de forme, un humour potache parfois de mauvais gout. Mais « Coupez ! » est un film différent et original. Lorsqu’on a un peu assez comme moi des comédies françaises formatées qui se ressemblent toutes, on ne peut pas faire la fine bouche devant un film qui s’éloigne à des kilomètres des sentiers battus.