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Petite cause, grande conséquence : c’est en voyant passer une affaire d’agression sur une tenancière de maison close que Rose se souvient d’une ancienne affaire non résolue, un des nombreux « cold cases » empilés sur le bureau du Département V : En 1987, une prostituée, Rita XXX s’est évaporée du jour au lendemain sans laisser de trace. Sans l’intérêt soudain de Rose et la curiosité méticuleuse d’Assad, cette disparition serait restée lettre morte. Mais les deux enquêteurs se rendent compte qu’au Danemark, la semaine de la disparition de Rita, plusieurs personnes se sont volatilisés, et pour un pays comme celui-là, c’est statistiquement étrange. En apparence ces gens n’ont rien en commun (un avocat, une infirmière, un mari pêcheur, une prostituée…), mais en creusant, ils s’aperçoivent qu’ils ont bien un petit dénominateur commun… qui sent politiquement le souffre de la droite la plus extrême et la plus radicale. S’ouvre alors pour le Département V une enquête à (très) hauts risque dans laquelle le trio risquent de perdre pas mal de plumes.
La quatrième enquête du Département V enfonce le clou d’une série de romans noirs décidément redoutables. Même si on commence à connaître un peu le schéma narratif de Jussi Adler-Olsen (une enquête qui commence par un trou de souris, une histoire de vengeance au long court expliquée par des flash back, des intrigues parallèles qui viennent parasiter l’intrigue principale, un final violent où les vies de Carl et Assad sont menacées), ça n’empêche pas le lecteur de marcher à fond dans le roman. Ici, il est question de l’extrême droite danoise, qui est particulièrement gratinée (mais quand on connaît l’histoire de la collaboration en Scandinavie, on ne tombe pas de l’armoire), de ses méthodes dignes des SA, de son infiltration dans toutes les strates de la société et de ses ambitions décomplexées. On peut trouver qu’ Adler-Olsen exagère, force le trait et en rajoute toujours plus pour choquer mais je me garderais bien, de là où je suis, de lui faire ce procès en diabolisation. L’intrigue est construite comme un puzzle, comme d’habitude, et comme d’habitude on comprend vite et clairement où cela va nous emmener : c’est passionnant, écrit de manière agréable (avec quelques pointes d’humour), on tourne les pages sans s’en rendre compte et on arrive au bout des 46 chapitres en un clin d’œil. Et, cerise sur le gâteau, on se laisse cueillir par un rebondissement final qu’on n’avait pas vu venir ! Carl, Assad et Rose, toujours attachants, et ne même temps toujours un peu mystérieux : Rose est-elle psychotique ? Quelle vie a connu Assad en Syrie ? Carl arrivera-t-il enfin à faire la lumière sur l’affaire du pistolet à clou (voir tomes 1, 2 et 3) ? Ces personnages cabossés mais en même temps plein d’humour, parfois déconcertants, parfois désopilants, sont l’atout n°1 de cette saga. Avec « Dossier 64 », Jussi Adler-Olsen nous emmène aux confins d’un Danemark drôlement éloigné de l’image habituelle que l’on a de ce pays : misère, extrémisme radical, violence, illettrisme : il y a quelque chose de pourri dans ce royaume ! Jussi Adler-Olsen jette une lumière crue et sans concessions sur les plaies danoises, et elles sont assez vilaines.