
Un an et demi après les évènements funestes de « Sharko», alors que la France panse encore les plaies des attentats et que des pluies torrentielles menacent Paris, le commandant Sharko et son équipe se voient attribuer une nouvelle enquête bien tordue : Un cadavre enterré dans la foret de Bondy, un homme qui meurt dans les bras de Nicolas Bellanger juste devant le Bastion, en apparence rien de commun, et pourtant : sur le bras du premier se trouve tatouer l’heure précise de la mort du second ! Le nouveau Thilliez, gros pavé, nous emmène explorer les limites floues de la science et de l’éthique. Comme il l’avait fait maintes fois auparavant (voir « Gataca » ou « Le Syndrome E »), Thilliez nous offre un polar très documenté, il est question ici de bioéthique, des GAFA, du transhumanisme et autres joyeusetés post modernes sur lesquelles il est si difficile d’avoir un avis serein et tranché. L’enquête est touffue, les rebondissements sont assez nombreux et le nombre de personnages qui croisent l’intrigue conséquent, il faut donc un peu s’accrocher devant cette histoire qui commence comme une histoire de GPA sauvage, mais qui nous emmènera bien au-delà de ces questions polémiques. L’intrigue est touffue mais se laisse suivre, la fin est un peu en forme de queue de poisson (pour une suite éventuelle peut-être) mais je dirais presque que ce n’est pas la première qualité du roman. Les notions qu’il manipule sont certes complexes mais aussi passionnantes car elles interrogent beaucoup de nous : notre rapport à l’hérédité, aux réseaux sociaux, à la liberté individuelle, aux limites éthiques de la recherche. Mais le roman, au travers d’autres personnages, explore également la question du traumatisme et du deuil. Le roman est très ancré dans la réalité, on y évoque le Bataclan, l’attentat de Nice, les inondations de 2016. Cela a toujours été une constante dans le travail de Thilliez : camper son intrigue dans une France bien réelle pour mieux appuyer la crédibilité de ses romans. « Luca » ne sera pas mon Thilliez préféré, même passionnant je ne lui trouve pas la même force que « Sharko » ou « Pandemia » (qu’on ferait bien de relire en ce moment !), c’est sans doute à cause de la complexité scientifique des questions évoquées ici. Mais n’empêche, cela reste un roman noir touffu mais passionnant, qui mérite juste qu’on s’accroche un peu par moment, et dont les personnages principaux sont toujours aussi attachants.