
José et Maxime sont amis et tous deux actionnaires minoritaires d’une petite boite de BTP de Montpellier. Frustré de voir le patron de l’entreprise refuser d’être ambitieux, refuser de se lancer sans de grands projets, refuser de postuler aux appels d’offre de la mairie, refuser de confectionner des petites enveloppes de cash, ils décident de commanditer son assassinat en filant une enveloppe à Moïse, un caïd de la région. Le contrat est exécuté avant qu’ils aient le temps de faire marche arrière et comme prévu, ils prennent les rennes de la boite. Mais Moïse s’incruste, refuse de disparaitre du tableau et se met à se mêler de tout, jusqu’à devenir incontrôlable. En franchissant le Rubicon du crime, les deux amis ont mis le doigt dans un engrenage qui va les broyer.
Il y a un proverbe que j’affectionne qui dit que « Quand on déjeune avec le Diable, il faut une très grande cuillère », et bien « Persona non Grata » pourrait être l’illustration par l’exemple de cette maxime. Roschdy Zem se place derrière et devant la caméra pour ce thriller très court, et qui part bille en tête : pas le temps de présenter quoi que ce soit, dés la première scène l’argent change de main et le ver est dans la pomme. Comment les deux amis en sont-ils arrivés là? On ne pourra que le deviner au travers de tel ou tel indice, telle ou telle paroles glanés tout au long du film. Zem soigne le rythme de son film, ménage plutôt bien le suspens mais c’est au détriment de plusieurs choses. D’abord la photographie n’est pas très belle, le grain de l’image est assez bizarre, Ensuite, la musique est assez curieusement choisie, mis à part le tube de Francis Cabrel qui sert de générique de début, elle passe inaperçue, elle n’a rien de très intéressante. Et puis je trouve que les personnages, en tous cas certains personnages, manquent un peu de subtilité. Si le personnage de José, incarné par Nicolas Duvauchelle (le meilleur rôle pour la meilleure interprétation) est assez complexe, assez crédible, et même plutôt émouvant, les autres frôlent un petit peu la caricature. Raphaël Personnaz, que je n’avais jamais vu dans un rôle de méchant s’en sort assez bien, même si je trouve que son rôle manque un tout petit peu d’écriture et de profondeur. Roschdy Zem s’est octroyé le rôle de Moïse, ce tueur dont on ne saura pas grand chose, qui se colle à Maxime et à José tel un sparadrap que même l’argent n’arrive pas à décoller. Il s’incruste dans la boite, se mêle de tout, séduit la fille de celui-là même qu’il a exécuté, semble vouloir se poser en partenaire d’affaire. Même si Roschdy Zem est un acteur épatant, son rôle est un petit peu outrancier : son petit numéro dans les bureaux de l’entreprise sonne un tout petit faux, too much. Et puis la jeune Nadia Tereszkiewicz, qui incarne la délurée Anaïs, a hérité du rôle le plus tête à baffe du film. En petite fille riche et oisive, elle s’encanaille d’un bad boy, frissonne quand il l’emmène dans les bas fonds, s’habille de la façon le plus vulgaire possible parce que ça fait hype, c’est la cagole du film ! A l’image de ces personnages mal dessinés, pour ne pas dire bâclés, le scénario a un peu de mal à tenir la route. Déjà que le thème choisi n’est pas d’une folle originalité, mais les rebondissements sont finalement prévisibles, l’exemple du personnage d’Iris en est la preuve, on met deux minutes à sentir venir le coup fourré ! Construit un peu comme une spirale infernale, le long métrage montre bien qu’une fois la barrière de l’illégalité franchie, toutes les barrières morales tombent une à une comme des dominos. Il y a quand même une certaine morale dans tout cela, on finit toujours par payer le prix du sang que l’on a versé. La fin se voulait spectaculaire, elle l’est, d’une certaine manière et elle laisse un gout métallique en bouche. C’est la fin qui convenait, même si la toute dernière image est un peu étrange. Et on passera pudiquement sur quelques invraisemblances, pour ne garder que l’impression assez réussit de drame qui imprime les dernières minutes. Je dois dire que j’attendais mieux de ce film noir, un peu plus de profondeur psychologique peut-être, un peu plus de subtilité aussi. Et puis, c’est peu dire que la Ville de Montpellier ne sort pas grandie de ce film, sur ce plan là aussi, la subtilité n’étais pas au rendez-vous. Je pense, je suis même certaine, que Roschdy Zem est capable de faire bien mieux que ce « Persona non Grata » qui laisse un souvenir fugace au spectateur et à l’amateur de film noir.