
Avant de commencer à visionner la première saison de « The Crown », la Reine Elizabeth II c’était pour moi une vieille dame qui ressemblait un peu à ma grand-mère, sauf qu’elle portait des robes pastel et des chapeaux rigolos. En bonne républicaine, sa Majesté ne m’intéressait pas outre mesure. Mais après deux saisons de « The Crown », je vois les choses différemment. La série de Netflix a deux avantages en plus d’être très soignée au niveau du casting et de la photographie, c’est qu’elle nous apprend d’abord pas mal de chose sur la famille royale, vue de l’intérieur, et sur le fonctionnement de la monarchie Britannique, et qu’elle ne manque jamais l’occasion de bien replacer chaque épisode dans son contexte historique. Les deux aspects s’imbriquant parfaitement, qu’il s’agisse de la crise du canal de Suez, de la Décolonisation, de la Guerre Froide ou de l’assassinat de Kennedy. Claire Foy donne corps à une reine jeune, plutôt jolie, très soucieuse de bien faire et d’incarner son rôle mais parfois écrasée par le protocole, mal à l’aise vis-à-vis de Philip son mari, dépossédée de son rôle de mère aussi. A ses cotés deux rôles passionnants, celui de Philip, justement. Matt Smith incarne un Philip pétri de contradiction, à la fois très moderne et très rétrograde, cherchant en permanence sa place vis-à-vis de sa femme et devant composer avec un passé familial complexe. Enfant, en Allemagne, il a porté la croix gammée, sa sœur était une nazie convaincue. Il y a dans la deuxième saison deux épisodes formidables à propose du positionnement de la couronne britannique vis-à-vis du nazisme, dans un des deux j’ai appris beaucoup de choses sur l’attitude plus qu’ambigüe d’Edouard VIII (celui qui abdiqua pour épouser une américaine divorcée) avec le régime d’Hitler. La sœur de la reine, la princesse Margaret, est incarnée par le très jolie Vanessa Kirby. Là encore, le rôle est multi facette, à la fois forte, moderne, rebelle et enjouée, elle n’entre pas dans le cadre de la monarchie des années 50-60, encore très corsetée. La Couronne lui prendra tout : l’homme qu’elle aime, sa santé, sa santé mentale, sa joie de vivre. C’est pour l’instant, après deux saisons, le personnage le plus tragique de « the Crown », celui dont on sent d’emblée que l’amertume la fera glisser vers tous les excès, jusqu’à une fin prématurée. La première saison débute alors qu’Elizabeth n’est que Princesse et jeune mariée, et la deuxième saison se termine sur la naissance du 4ème enfant du couple royal. La série va continuer, avec d’autres acteurs d’après ce que j’ai compris, des acteurs plus vieux. Peut-être verra-t-on bientôt une peu plus la princesse Anne (quasi inexistante jusque là, alors que Charles a droit à un épisode rien que pour lui), Diana, Camilla, Margaret Thatcher, ou Tony Blair, peut-être évoquera-on l’assassinat de Lord Mountbatten, l’IRA, les grèves des mineurs, Bobby Sand, la guerre en Irak et tout ce qui fait cette deuxième moitié de XXème siècle. « The Crown » est une série un peu exigeante, historiquement fort intéressante, et qui permet de voir la royauté britannique sous un angle plus personnel, plus intime, moins caricatural aussi. La reconstitution est soignée, et même si « The Crown » n’a pas les qualités d’une série hyper grand public (le rythme narratif est un peu lent), c’est une série qui mérite le détour et à laquelle on devient vite accro !