
Je ne voulais pas rester sur la petite déception que représentait pour moi « La disparition d’Emilie Brunet » en redonner vite sa chance à Antoine Bello. Et j’ai bien fait car « L’Homme qui s’envola » est un petit bijou. Walker a tout réussi dans sa vie, il est à la tête d’une entreprise de messagerie florissante, il est marié à une femme merveilleuse, a trois beaux enfants en bonne santé, un maison magnifique et tout le monde chante ses louanges. Mais Walker a un problème avec le temps, il a un rapport assez schizophrène avec le temps qui passe, il enrage quand on le lui en fait perdre, et en même temps ça le mine de ne plus en avoir jamais pour lui seul tellement son planning est chargé. Germe un jour dans son esprit une idée extrême : simuler sa mort et disparaitre, jouir de la vie égoïstement comme il n’a jamais pu le faire. Il met son plan murement réfléchis à exécution mais il y a deux choses que le super entrepreneur n’avait pas prévu : qu’il se blesse sérieusement et que la compagnie d’assurance vie lance une enquête sur sa pseudo mort. Le détective privé qu’elle charge de cette enquête est redoutable et très vite, il acquiert la conviction puis la preuve que Walker est en vie. S’engage alors un jeu de chat et de souris qui ne laisse à Walker aucun répit. Construit en 3 parties, le roman de Bello se dévore tout seul, la première partie montre un Walker qui laisse l’idée de disparaitre l’envahir, prépare son plan (qui sur le papier est parfaite) et le met à exécution. Dans la deuxième partie, Walker comprends qu’il n’est pas aisé de survivre de la façon qu’il a imaginé et Sarah, sa femme, entame un deuil douloureux, jusqu’à ce qu’un détective lui prouve qu’elle n’est pas veuve, qu’elle a été abandonnée. Furieuse, elle engage le détective pour traquer son mari, ce qui fera l’objet de la troisième partie. Le chat chasse la souris dans toute l’Amérique, la souris se joue du chat, devient un peu parano puis de retourne contre lui. C’est un duel à distance entre deux notions, celle de la Liberté et celle de la Responsabilité et au-delà des techniques redoutables déployées par Nick pour tracer le fugitif (c’est instructif et passionnant, voire un peu anxiogène), c’est bien cette lutte entre deux hommes très intelligents mais qui n’ont pas la même conception de l’Honneur et du Libre Arbitre qui passionne. La fin, très belle, très douce et presque poétique, m’a beaucoup plu, alors j’ai longtemps cru que Bello se dirigeait vers une fin noire, cruelle et ironique. « L’Homme qui s’envola », un roman court, dont tous les personnages sont attachants, parfaitement construit et qui prouve encore une fois qu’Antoine Bello sait raconter des histoires folles, tout en les rendant passionnantes et curieusement crédibles !