Le coin des livres : Territoires

Deuxième incursion dans le monde d’Olivier Norek après le prometteur (mais quand même un peu compliqué au niveau de l’intrigue) « Code 93 ». Cette fois-ci, Norek nous emmène à Malceny, ville du 93 qui fait furieusement penser à la Baltimore de « The Wire »… en presque pire ! Des cités entièrement  contrôlées par la trafic de drogue, perpétuellement sur le point d’exploser, des émeutes pleine de sauvagerie, des gamins de 12 ans sans morale mais armés, un maire corrompu jusqu’à l’os, et au milieu de tout cela, comme dans la série américaine de Simon, un groupe de flic du SRPJ 93 qui tente de faire le boulot sans rajouter à la violence omniprésente.  L’intrigue est parfaitement lisible cette –fois ci, douloureusement crédible (à part quelques détails, j’y reviendrais). La cité sensible est en train de « changer de main » et un nouveau boss élimine l’ancienne équipe de trafiquants, terrorise les « nourrices », promets de la nouvelle marchandise à ses petites mains. Coste et son équipe, chargés d’enquêter sur les meurtres, doivent à la fois tenter de dénouer le nœud d’un trafic de drogue très élaboré sans faire exploser la poudrière, un numéro d’équilibriste rendu d’autant plus compliqué par la malsaine rivalité de l’autre groupe de la crim 93. Difficile de décrocher de ce polar pur sucre, dense et ramassé bien comme il faut, avec des personnages suffisamment bien écrits pour n’en jamais faire des héros ni des salauds. Les scènes intenses (lors des émeutes notamment) nous laissent le souffle court tellement elles sont bien écrites. Il n’y a pas photo à mes yeux « Territoires » est meilleur que « code 93 », les petits défauts du premier sont gommées ici, même si la peinture que Norek fait de la Seine Saint Denis est toujours d’une noirceur qui interpelle (il en rajoute ou pas ? A plusieurs reprises on se pose la question), le roman est difficile à lâcher, et jusqu’à la dernière page. Forcément très documenté au niveau du fond (puisque écrit par un policier de terrain qui sait fichtrement de quoi il parle !), il ne souffre que de quelques petites, toutes petites erreurs sur des détails, notamment au niveau des Finances publiques (Ben oui, sur ce sujet je connais moi aussi un peu la réalité des choses, chacun son travail), des valises de billets, des faux contrats de travail, des dotations de l’Etat, des Directeurs des Affaires Financières (on ne dit plus « trésoriers » depuis bien longtemps) et autres petites choses ici ou là. Mais je ne vais surement pas en tenir rigueur au lieutenant Norek, qui m’a emmené par la main dans la ville de Malceny pour me montrer par le menu ce qu’est une ville de banlieue « tenue » par le trafic de drogue. Pour ce faire, il a construit une intrigue claire, solide, passionnante et en plus, il a ménagé un petit coup de théâtre sur l’identité du nouveau « boss » que personne ne peut voir venir ! Il me tarde déjà de retrouver le très attachant Victor Coste et son groupe pour une nouvelle enquête, toujours dans cette Seine Saint Denis qui ressemble tant à la Baltimore de HBO, la mer en moins !