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Un point c'est (pas) tout

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Blog sur tout ce qui rend la vie plus chouette...


Critique cinéma : K.O.

Publié par Christelle Point sur 25 Juin 2017, 15:07pm

Après un premier film passé inaperçu et pourtant plein de qualités prometteuses (« Simon Werner a disparu ») et un détour par le petit écran avec la désormais célèbre série « Les Revenants » (dont il est à peine exagéré de dire qu’elle a fait le tour du monde), Fabrice Gobert fait son retour au cinéma avec « K.O. ». Il offre à Laurent Lafitte le rôle de Jean-Luc Delarue. Je plaisante… Mais pas tant que ça… Pendant les 20 premières minutes du film il est impossible de ne pas penser à JLD devant ce producteur de TV en pleine dérive narcissique, au bord du gouffre physiquement et dévoré par sa propre ambition et la flagornerie ambiante. Mais j’imagine qu’appeler son personnage Jean-Luc aurait été un peu trop voyant !

 

Antoine Lecomte est producteur TV, directeur des programmes d’une importante chaine de TV, il gagne très bien sa vie, sponsorise des boxeurs, délaisse sa famille. Odieux avec ses collaborateurs tout autant qu’il est odieux avec les femmes, Lecomte va finir par payer son arrogance au prix fort, en prenant une balle dans le buffet à la sortie d’un ascenseur. Lorsqu’il émerge du coma à l’hôpital, tout est différent : sa vie n’est plus la même, sa position sociale n’est plus la même et celle des autres non plus : est-il toujours dans le coma ? Est-il mort ou retrouve il sa véritable vie ?

 

Vous connaissez « Family man » avec Nicolas Cage ? Et bien « K.O. », c’est la version noire et cynique de « Family man ». Autant le film américain était plein de bon sentiment et consensuel, autant « K.O. » joue dans un autre registre, plus proche de celui des « Revenants » et c’est logique quand on sait que c’est Fabrice Gobert qui est aux manettes. D’un point de vue technique, « K.O. » à les mêmes qualités que « Les Revenants » : images léchées, plans audacieux, photographie soignée, habillage musical hyper cohérent (et hyper intéressant, ce film mériterait presque qu’on aille fureter du côté de sa bande originale), Gobert est un réalisateur qui ira loin et qui, j’en suis sure, en a encore pas mal sous le pied. Ca fait plaisir quand même de voir qu’on peut proposer des films d’une vraie qualité technique aujourd’hui en France, des films où on sent que chaque plan est murement réfléchis, que chaque scène est fignolée, que la musique n’est pas pensée pour appuyer mais pour « colorer » une émotion, un moment, une idée. Bref, « K.O. » est un film qui a de la personnalité et ça détonne un peu dans le cinéma français très formaté de ces derniers temps. Le casting est impeccable, Laurent Lafitte en tête bien entendu. Dans le rôle d’un type absolument imbuvable pendant les 20 premières minutes du film, il est étrangement crédible. J’entends par là qu’on pourrait penser qu’un mec comme ça est à la lisière de la caricature (parce qu’il est vraiment, vraiment odieux !) mais Lafitte lui donne corps avec suffisamment de conviction pour qu’on finisse par lui accorder un certain crédit, voire même un peu de sympathie au fil des minutes. Il y a pléthore de seconds rôles à ses côtés : Pio Marmaï (dans un rôle malheureusement sous-écrit, c’est dommage quand on a Pio Marmaï dans son casting d’en faire presque un figurant !), Chiara Mastroianni, Jean-Charles Clichet (qui hérite du rôle de looser, le plus intéressant sans doute) ou encore Zita Hanrot. Tous sont très bien, rien à redire, sauf que le scénario leur donne, et c’est logique au regard du film, des rôles un peu ambigus, pas toujours lisibles et donc difficile à mettre en valeur. Le scénario de « K.O. » est complexe, il est même un peu retord par moment. L’idée de mettre en scène un type qui, au réveil, semble dans un monde presque parallèle n’est pas nouvelle mais elle est toujours efficace car c’est toujours un bon moyen de faire passer un message ou tout du moins des idées. Dans le cas présent, lorsqu’Antoine se réveille de son coma, il est difficile de croire qu’il est dans la réalité tant certains détails semblent surréalistes (on en sort pas de sa chambre d’hôpital après un coma en quelques heures et de sa propre initiative, surtout quand on a eu le thorax ouvert en deux !). Pourtant, pendant les 20 premières minutes, le scénario a donné des clefs qui viennent ébranler la certitude qu’Antoine comate toujours (les mystérieux malaises). Le film joue les funambules entre réalité et illusion, avec une certaine efficacité je dois bien l’avouer. La première idée est qu’il est dans le coma et qu’il « paye » inconsciemment l’addition de son comportement professionnel et personnel, ce qui est un ressort scénaristique un peu facile (et un petit peu moralisateur aussi !). Mais on n’aura jamais la certitude qu’on est dans le vrai, jusque dans les toutes dernières secondes du film où tout est remis en cause. Cette extrême fin a le mérite de laisser la porte ouverte à différentes interprétations : je crois avoir compris quelque chose mais mon voisin de siège en a peut-être compris une autre ! « K.O. » est un film sur lequel tout le monde aura une théorie et une opinion, et le scénario, en semant des cailloux blancs ici ou là, des cailloux blancs qui parfois nous égarent, aura parfaitement fonctionné ! Cela dit, je dois reconnaitre qu’à force de vouloir me semer, « K.O. » a quand même été à deux doigts de me perdre en route. Je ne suis pas sure d’avoir compris la pertinence de certaines scènes (le flight club), le film tire un peu en longueur sur la fin, il connait même un léger trou d’air vers ses deux tiers. Il s’en est fallu de peu que « K.O. » soit victime de lui-même et se fourvoie dans le « n’importe quoi ». C’est toujours un exercice difficile de marcher sur un fil et il et se rattrape de justesse par moment, il faut bien le reconnaitre ! Du coup, je suis peut-être passé à coté de quelques petites choses (la scène avec la pochette de 33t, je ne sais pas quoi en penser) parce que le scénario, à force de vouloir être tortueux, en finirait presque par devenir illisible. Gobert voulait faire un film à clefs mais il ne les donne pas toutes de manière à ce qu’on les comprenne complètement, il a eu tendance à confondre mystérieux et fumeux : son scénario est plein de mystère mais par moment on a la désagréable impression qu’il cherche à nous enfumer et c’est un peu dommage : une trame un tout petit peu plus lisible aurait donné un film plus percutant. Mais « K.O. » reste un thriller paranoïaque plein de qualités, qui a le bon gout d’être techniquement soigné, parfaitement interprété et suffisamment pointu pour qu’on sorte de la salle sur une impression agréable, celle de l’incertitude.

 

Bande Annonce de "K.O."

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