Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Un point c'est (pas) tout

Un point c'est (pas) tout

Blog sur tout ce qui rend la vie plus chouette...


Critique cinéma : Get Out

Publié par Christelle Point sur 25 Mai 2017, 14:50pm

Chris est très amoureux de sa petite amie Rose et, malgré ses réticences, il accepte de passer un week-end chez les parents de Rose, afin de faire leur connaissance. Il est réticent parce que Rose est blanche et lui est noir, et dans l’Amérique d’aujourd’hui c’est encore et toujours une question délicate. Après un voyage mouvementé, la première impression de Chris est plutôt mitigée : les parents de Rose sont affables et ouverts d’esprit, mais quelques détails le mettent mal à l’aise, notamment l’attitude étrange des domestiques noirs de la maison. Plus le week-end avance, plus les petits détails troublants s’accumulent, plus le malaise de Chris s’amplifie. Ce qu’il va découvrir au bout de ce week-end dépasse l’entendement.

 

Plutôt que de dire que « Get out » est un film inclassable, j’aurais envie de dire que je viens de voir en salle un film « transgenre ». Le long-métrage de Jordan Peele est à la fois, un thriller, une fable politique et un film d’horreur, et pour tout dire, il est percutant, dans son genre si particulier ! On peut le découper presque en deux parties, la première installe l’angoisse avec tous les codes du genre : des petits détails apparemment sans importance (un chargeur de téléphone en permanence débranché, une porte laissée ouverte, une étrange attitude furtive devant un miroir,…), une musique parfois percutante mais parfois aussi un peu en décalage (comme dans le générique de début, où l’angoisse se trouve étrangement amplifié par un musique complètement décalée) ce qui ajoute à un malaise diffus et presque impalpable. Là, on est dans le thriller pur sucre, sobre, efficace et très bien maîtrisé. Jordan Peele, avec vraisemblablement peu de moyen, soigne son film en ciselant chaque scène. Tout est bien filmé, bien photographié, sous le bon angle, avec l’atmosphère qu’il faut mais sans en faire trop, bref, c’est très bien fichu. D’ailleurs, la scène d’ouverture donne le ton, elle n’est pas bien longue, au début on ne comprend pas bien quels liens elle aura avec la suite du film mais elle pose une atmosphère avec pas grand-chose : un homme, une rue, une voiture. La dernière partie du film, qui délaisse le genre « thriller » pour faire la part plus belle au genre « horrifique » (mais ça reste supportable, pas d’inquiétude, on n’est pas dans « Evil dead » non plus !) coche là aussi tous les codes du genre, jusqu’à frôler la parodie parfois (oui, je vois dans cette fin qui n’a pas plu à tout le monde un soupçon d’autodérision) : subitement, on bascule du « suggéré » au « cru et sanglant ». Et là encore, c’est plutôt réussi techniquement, il y a la violence qu’il faut mais sans sombrer dans le gore ou le « beurk », il y a le suspens qu’il faut sans verser dans l’improbable. Bref, c’est un film tenu par un réalisateur visiblement très doué et appliqué. Au niveau du casting, c’est évidemment Daniel Kaluuya qui à le beau rôle, celui qui doit faire passer le malaise et il le fait particulièrement bien. Mais les seconds rôles sont très bien incarnés, plutôt bien écrits et plutôt bien mis en valeur, et ce n’est pas toujours le cas : Bradley Whitford (que les fans de « The West Wing » retrouveront dans un rôle aux antipodes ce que qu’il a pu prouver auparavant), Catherine Keener et surtout Allison Williams, qui révèle, plus le film avance, une palette de plus en plus étendue de son talent. Le scénario de « Get out » n’est pas hyper crédible mais c’est heureux ! Il ne faut pas trop en dire évidemment sous peine de spoiler le film et ce serait fort dommage. Mais ce qu’on peut en dire c’est que même si on met le doigt assez vite sur ce qui cloche dans cette belle maison, surtout grâce à l’attitude des domestiques noirs et à quelques réflexions racialement ambigües, cela ne gâche pas le plaisir du spectateur. Personnellement, je n’ai pas eu l’impression d’un « coup de théâtre » lorsque les masques sont tombés, mais cela n’a pas d’importance. Ce qui fait sens dans « Get out », c’est le contexte politico-racial qui sous-tend tout le film, de bout en bout. Dans l’Amérique Trumpienne de 2017, le racisme sous-jacent qui imprègne presque chaque scène de « Get out » est un racisme différent, moins bourrin et binaire mais presque plus malsain tant il est pervers et dissimulé. C’est bien cet arrière-gout désagréable qui donne au film de Jordan Peele sa puissance en tant que fable politique, c’est cet arrière-gout permanent qui fait qu’on se retrouve embarqué dans cette histoire improbable mais que pourtant on marche dans la combine. En plus, il y a un peu d’humour de temps en temps, par le personnage (pas du tout anecdotique) du pote resté en ville et qui garde le chien. L’humour, parce qu’il tranche au milieu d’un film très anxiogène, n’a pas besoin d’être omniprésent pour détendre un peu l’atmosphère et relâcher (un peu) la pression. La fin, je le disais, n’a pas plu à tout le monde et beaucoup la trouve grotesque. Ils s’imaginaient peut-être une fin plus cynique (ça aurait fonctionné aussi), moins horrifique ou je ne sais quoi. Moi, elle m’a un tout petit peu surprise mais elle me convient. Elle flirte, comme je l’ai dit, avec la parodie et je trouve qu’elle tombe finalement plutôt pas mal. Elle clôture, peut-être un peu bizarrement, un film qui ne ressemble à aucun autre film et qui, dans son genre, vaut le déplacement.

 

La Bande annonce de "Get Out"

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article

Archives

Nous sommes sociaux !

Articles récents