Le coin des livres : Gravé dans le sable

« Gravé dans le sable » est le tout premier roman de Michel Bussi, qui vient juste de ressortir en poche sous ce titre alors qu’il a connu deux autres titres que je trouve personnellement plus appropriés et mois « bateaux » : « L’Ardoise » et « Omaha crime ». L’intrigue se déroule entre les plages de Normandie et les Etats-Unis et successivement en juin 1944, en 1964 et pour boucler la boucle en 1975. Un pacte scellé la veille de débarquement entre deux GI qu’Alice, la jeune veuve de l’un des deux, a toutes les peines du monde à faire appliquer. Un contrat conclu entre un GI fortuné qui avait tellement peur de mourir et un plus modeste qui n’avait peur de rien, un contrat financier, bien entendu. C’est l’histoire de ce contrat, sous la forme d’un immense jeu de piste, que « Gravé dans la sable » raconte. Dis comme cela, ça peut paraitre un peu étrange pour un thriller mais le roman fonctionne et parfois, on a du mal à décrocher. Il a ce qu’il faut de faux semblants (est on mené en bateau depuis le début ?), de retournements de situation vers la fin aussi. Le suspens n’est certes pas échevelé, le rythme non plus d’ailleurs, c’est peut être ce qui découragera les amateurs de thriller conventionnels. C’est un premier roman, l’auteur le reconnait en introduction, il a quelques petits défauts : des digressions parfois un peu longues, des personnages un peu trop nombreux et parfois un tout petit peu caricaturaux, quelques apartés qui n’apportent pas grand-chose (la visite du musée par Léonce, à la fin du roman, par exemple, ou bien les longues scènes de bistro normands), et puis Bussi prend peut-être quelques libertés avec l’histoire du D-Day. Mais le jeu de piste est astucieux, un peu retors sans qu’on puisse décrocher, intriguant juste ce qu’il faut, avec des petits cliffhangers à la fin des chapitres, ce qui prouve que Bussi, pour un premier roman, avait déjà bien compris les codes du genre. Mais ce qui est appréciable dans « Gravé dans le sable », c’est l’omniprésence de l’humour, au travers de certains personnages comme le détective privé amoureux (amoureux comme un adolescent à 40 balais, c’est mignon), le tueur à gage coiffeur et au travers de quelques personnages très secondaires mais hauts en couleurs ! Le style agréable, l’intrigue intéressante, le contexte du Débarquement (original pour un thriller), l’humour et la galerie de personnages truculents que Bussi nous propose font passer ce roman tout seul, et l’on lui pardonne aisément ces petits défauts, ces petites longueurs, ces quelques petites invraisemblances aussi. Encore qu’il y en a moins, beaucoup moins à mes yeux que dans « N’oublier jamais », que j’ai lu juste avant et qui pourtant a été écrit bien après. Plus roman historico-policier que vrai thriller, « Gravé dans le sable » mérite sa troisième réédition en poche, pour le rendre accessible à tous.