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Un point c'est (pas) tout

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Critique cinéma : En Mai fais ce qu'il te plait

Publié par Christelle Point sur 15 Novembre 2015, 16:26pm

Critique cinéma : En Mai fais ce qu'il te plait

Aller au cinéma… Comme tous les dimanches où presque, aller au cinéma pour m’échapper du quotidien. Aller au cinéma pour, pendant deux petites heures, m’immerger dans une autre réalité et retrouver un peu de souffle. Ce dimanche, je suis allée au cinéma comme un tout petit, minuscule, acte de résistance. Et j’ai choisi le film de Christian Carion «En mai fais ce qu’il te plait», un film qui traite de la Débâcle, d’une période où la France allait mille fois plus mal qu’aujourd’hui et qu’elle a pourtant surmonté.

Mai 1940, la drôle de guerre, c’est terminé ! Les allemands ont envahi la Belgique et foncent vers Paris, ce qu’il reste des armées françaises et britanniques est encerclée dans la poche de Dunkerque. Pour les habitants d’un petit village de la région d’Arras, c’est la fuite vers la Sud, vers Dieppe. Parmi eux, le jeune Max de 8 ans. Max est allemand, son père Hans est un antinazi qui pensait avoir trouvé son salut en France et se faisant passer pour un réfugié flamand, mais les français l’ont emprisonné quand ils ont compris qu’il était allemand. Max avance avec les réfugiés vers Dieppe, son père, libéré de sa prison, essaie de les rejoindre avec l’aide d’un officier écossais perdu loin de ses bases.

La Débâcle, ce n’est pas l’épisode de la Seconde Guerre Mondiale le plus filmé par le cinéma français. En France, pendant longtemps, on a préféré traiter de l’Occupation et surtout de la Libération mais la Débâcle et l’Exode, à part dans « Bon voyage » de Jean-Paul Rappeneau, les films à leur sujet sont bien rares. Du coup, le film de Christian Carion a déjà un grand mérite, c’est celui-là. « En mai fais ce qu’il te plait » (très joli titre) montre en alternance deux intrigues : d’une part la fuite un peu vaine, éperdue sur les routes d’un village rural entier et d’autre part, le course-poursuite de Hans et Percy pour les rattraper, avec derrière eux (et bientôt devant !) des divisons de Panzers qui avancent en France comme dans du beurre. Cette double intrigue donne du rythme au film de Carion, permettant d’alterner des scènes de combats dures, violentes, avec des scènes plus douces d’un cortège qui avance tranquillement sur la route à la vitesse d’un cheval qui trotte. Sauf que, historiquement c’est imparable, les deux ambiances se rencontrent et cela donne la scène très réussie de l’attaque des Stukas avec leurs sirènes si typiques et si terrifiantes qu’elles se sont imprimées dans l’imaginaire collectif et qu’elles représentent, à elles seules, la terreur pure des civils face à une aviation ennemie. Christian Carion filme intelligemment, parfois caméra à l’épaule pour les scènes de « guérillas », utilisant les sons et la musique (d’Ennio Morricone, excusez du peu) comme il faut. Il se fait même plaisir en jouant aves le soleil et l’ombre juste avant la fameuse attaque. C’est un peu lyrique parfois, un peu trop romanesque à d’autre moments (les retrouvailles dans le cimetière), çà flirte aussi avec le pathos mais çà reste tout à fait acceptable et anecdotique au regard de l’ensemble du film. Le casting est assez inégal, Olivier Gourmet est excellent mais c’est un acteur qui n’est jamais autre chose qu’excellent ! A ses côtés Mathilde Seigner est juste dans un rôle qui aurait peut-être pu être un tout petit plus écrit et mis en valeur. August Diehl, Alice Isaaz et le petit Joshio Marlon sont irréprochables. On n’en dira pas autant d’un Laurent Gerra qu’on a cantonné à un rôle qui est la caricature de lui-même. Pour son premier grand film, on aurait pu lui donner autre chose à jouer qu’un type un peu lâche, un peu limité, un peu porté sur la bouteille et vaguement (très vaguement) drôle. J’ajoute quand même une mention spéciale à Matthew Ryss, que j’aime beaucoup dans l’excellente série « The Americans » et que je retrouve avec beaucoup de plaisir dans le rôle de Percy, officier écossais perdu loin de ses bases mais qui ne se départi jamais d’un certain flegme assez british. Le scénario co-écrit par Carion montre avec une certaine efficacité la stupeur et la sidération qui gagnent le peuple français en mai 1940. C’est une période d’effondrement total et hyper rapide qu’on a sans doute du mal à imaginer aujourd’hui : en quelques jours : plus rien, plus de pouvoir politique, plus d’armée ni de police, plus d’administration, plus de maisons, plus de terres, plus rien. D’un seul coup, ce pays pour lequel beaucoup ont combattus 20 ans auparavant (20 ans, à peine une génération) s’effondre et se fait dévorer par celui qu’elle avait eu tant de mal à vaincre. « On ne va quand même pas perdre la guerre en 10 jours ! » dit-on encore dans les dix dernières minutes du film, ben si… La plus belle scène du film, le plus marquante est emblématique de cela : le petit cortège est rattrapé par des panzers qui foncent vers le Sud : ils pensaient les fuir, ils sont doublés et à quelle vitesse en plus ! Cette scène assez courte, sans dialogue, ne vaut que par les regards hébétés des gens qui comprennent à ce moment là que leur pays n’existe tout simplement plus, c’est une scène historiquement incontestable et émotionnellement très forte. Christian Carion évoque aussi, dans son film, les films de propagande tournés par l’armée allemande pendant la bataille de France. Il montre l’envers du décor, comment étaient reconstitués les combats : on donnait aux prisonniers français des armes chargées à blanc comme çà on faisait d’une pierre deux coup : on avait de belles images de combat et se débarrassait des prisonniers. Je ne sais pas si c’est historiquement exact mais connaissant l’idéologie nazie mortifère et le pragmatisme allemand, cela me parait tout à fait crédible ! Historiquement, le film peut difficilement être pris en défaut, je n’ai pas noté à mon petit niveau d’erreur grossière dans la forme comme sur le fond. On peut reprocher à Christian Carion d’avoir cédé à quelques facilités sur la forme, d’avoir trop peu écrit certains rôles, surtout les rôles féminins et aussi peut-être, une certaine candeur par moment. C’est difficile à expliquer mais il y a pas mal de bons sentiments dans « En mai fais ce qu’il te plait », une vague odeur aussi de « bon sens paysan » qui semble un peu daté. Carion a voulu faire un film populaire un peu trop populaire justement, un poil trop consensuel peut-être.

Mes grands parents avaient 20 ans en 1940, je n’imagine pas de pire époque pour avoir 20 ans… Ils m’ont souvent raconté la Guerre et surtout cette Débâcle qui les avaient tant marqués, presque traumatisés. Si Christian Carion à fait ce film en pensant à sa mère, moi je suis allée le voir en pensant à mes grands-parents.

http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19557510&cfilm=204159.html

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