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« Ring » en Anglais (et en alsacien aussi parait-il), cela signifie « Anneau » et donc par extension « Alliance » alors qu’en français, c’est plutôt un endroit où se donne des coups et où se fout sur la gueule… ! C’est le postulat de départ de « Ring ! », la dernière création du Théâtre amateur de Truchtersheim. Pas de décors, quasiment pas d’accessoires, juste une scène en forme de ring de catch avec les spectateurs tout autour, comme pour assister à un match. Pas d’intrigue, pas de pitch à raconter, « Ring ! » c’est une succession de scènes piochées çà et là dans le répertoire littéraire, théâtral, cinématographique, des scènes qui traitent toujours du même thème : l’amour. Enfin… l’amour sous toutes ses formes, sans mièvrerie aucune : le couple, le désir, l’affrontement des ego, les trahisons amoureuses, les polissonneries, le romantisme, c’est l’amour au sens large du terme qui sert de fil conducteur à cette pièce de plus de deux heures sans entracte. La sélection opérée par le metteur en scène Jean –Luc Falbriard est suffisamment étoffée pour que tout le spectre de la question soit balayé, tout en évitant de tourner en rond, ce qui était clairement l’écueil n°1 de ce défi. L’humour est omniprésent, souvent subtil, parfois grivois mais sans jamais tomber dans le vulgaire. J’en veux pour exemple « Alpenstock » de l’auteur belge Rémy De Vos, qui reviens à trois reprises dans le spectacle sans jamais faiblir, une variation sur le désir et l’adultère très drôle qui mise beaucoup sur un comique de répétition poussé à l’extrême et à des dialogues ciselés. J’ai aussi beaucoup apprécié, dans le genre humour ironique « Mariage » de Joël Pommerat et le clou du spectacle, le bouquet final que constitue « Carnaval sans animaux » de Jean-Michel Ribes (une référence), inoubliable et parfaitement interprété. Et puis, à côté de l’humour, il y a la tendresse de « Se souvenir des belles choses » de Zabou Breitman (plein de poésie céleste jusqu’au tout dernier mot de la scène qui nous ramène brutalement à la réalité des relations amoureuses !), l’amour douloureux de « Mémoire » de Joël Pommerat, ou encore l’amour schizophrène de « Réincarné » de Pierre-Henri Cami. Ces scènes sont intelligemment placées dans le spectacle, coupées de temps à autre par des chansons : « Le petit bal perdu » de Bourvil (un régal) et « Je suis venu te dire que je m’en vais » de Serge Gainsbourg, interprété avec talent mais sans toute l’émotion et la pudeur délicate que le texte de Serge requiert, dommage… Au total, 23 scènes de durée et de couleur artistique très différentes, pas moyen de s’ennuyer. Mais c’est inévitable, le principal défaut de « Ring ! » est inhérent à sa forme : c’est assez inégal. A deux ou trois reprises, le soufflet retombe un peu : un monologue trop long et interprété sans l’émotion nécessaire (« Les fesses » de Gérard Levoyer), une joute oratoire qui ne sonne pas comme elle devrait (la scène du boxeur, je ne me souviens plus de son titre) ou encore quelques courtes scènes en alsacien qui laissent de côté les non dialectophones (même si on devine de quoi il s’agit, c’est un peu frustrant !). Mais pas de quoi gâcher le plaisir de voir des acteurs amateurs se donner à 200%. En l’absence de décors et d’accessoire, c’est bien sur le seul des acteurs que repose l’intérêt de « Ring ! », sur la mise en scène, le rythme avec lequel les enchainements s’opèrent, et tout cela est parfaitement maîtrisé par la troupe de Truch. Bravo à eux, bravo à Jean-Luc Falbriard et merci pour « Les mots et la Chose » de Jean-Claude Carrière, qui m’a permis d’élargir mon vocabulaire coquin !
Pour en savoir plus : http://www.theatredetruch.com/