Critique cinéma : La cage dorée

« La cage dorée » de Ruben Alves entre dans la catégorie des comédies que j’appelle « les comédies communautaires », ce qui signifie d’emblée qu’elle va manipuler bon nombre de clichés et pas toujours avec recul, on se souvient de « La vérité si je mens » ou de « Black Micmac » et qui ne faisaient pas vraiment dans la dentelle. Du coup, on peut avoir une légère appréhension en entrant dans la salle. Mais cette fois, bonne surprise, c’est fait avec subtilité et avec tendresse, et çà passe tout seul !

Maria et José sont arrivés en France en 1979 et, depuis 30 ans, ils travaillent dur et ils travaillent bien. Elle est une concierge attentionnée dans un immeuble haussmannien des beaux quartiers de la capitale, toujours disponible et n’osant rien refuser aux propriétaires de l’immeuble qui en profitent de manière éhontée. Lui travaille dans la BTP (évidemment…) et est devenu chef d’équipe sans compter ses heures. Leurs deux enfants ont réussis et leur vie de labeur s’écoule doucement. Jusqu’au jour où le frère de José meurt en leur laissant en héritage un domaine viticole au Portugal et l’occasion se présente de retourner au pays. Bien qu’ils ne disent mot à personne de cet héritage, la nouvelle se répand malgré eux et personne n’a envie de voir partir des gens si efficaces, si disponibles, si… corvéables !

Même si le film de Ruben Alves souffre de quelques défauts, presque inhérents au genre, c’est une vraie bouffée d’air frais qu’on ressent devant « La cage dorée », un film qui passe trop vite, et çà c’est un signe. D’abord parce que il y a une vraie tendresse dans ce film, une vraie tendresse pour cette communauté portugaise si présente en France et si discrète. De mémoire, c’est un des premiers films à évoquer cette communauté et c’est bien là le signe qu’elle s’est fait tellement discrète, qu’elle s’est tellement bien intégrée qu’elle a été assimilée. Le film la montre soudée, animée par un patriotisme « sain » qu’on ne retrouve plus guère que chez les expatriés de nos jours, mais en même temps tellement reconnaissante d’avoir été accueillie qu’elle en a presque été acculturée. Il y a matière à une vraie réflexion sur ce sujet, je trouve, au-delà même du film et je suis bien certaine que tous les français d’origine espagnole ou italienne, ou bien encore polonaise trouveront dans « La cage dorée » de quoi se poser des questions essentielles sur leur identité. Mais revenons au cinéma… Les interprètes sont épatants, avec une mention spéciale pour l’attendrissante Rita Blanco en mère de famille effacée qui ne sait pas dire « non » ou « merde » et qui use sa vie au service des autres et est obsédée par l’opinion que les gens vont avoir d’elle, au point de faire son lit dans un hôtel 3*** ! Je me suis sentie très touchée par son personnage, allez savoir pourquoi (hum)… Même si la fin du film fait un peu trop dans le « happy end » obligée (il y aurait eu ici moyen de faire plus subtil sur ce point quand même, on se croirait dans une pub !), le scénario est intelligent et efficace à défaut d’être inventif. Bon, les rebondissements ont les voit arriver d’assez loin, mais « La cage dorée » compense en subtilité ce qui lui manque en originalité. Alors évidemment on n’y coupe pas : la morue, le fado (que c’est triste comme musique, on dirait un long gémissement ! Je ne me vois pas écouter çà chez moi sans avoir envie de m’ouvrir les veines !), le derby Porto-Benfica, et même Linda de Suza, rien n’est oublié et rien ne nous est épargné ! Mais comme je le disais, c’est presque inhérent au genre, alors on sourit et on passe l’éponge ! « La cage dorée » est une jolie petite cage que nous aussi, nous quittons à regret quand la lumière se rallume.

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