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Un point c'est (pas) tout

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Critique cinéma : Imitation Game

Publié par Christelle Point sur 1 Février 2015, 16:04pm

Critique cinéma : Imitation Game

Ce film là, je l’attendais et je l’ai vu venir de loin… Pourquoi ? Parce que j’ai entendu parler d’Alan Turing pour la toute première fois il y a très peu de temps : Dans (l’excellent) roman de Jean Teulé « Le magasin des suicides », il y a un passage édifiant où une mère raconte à son petit garçon pourquoi elle l’a prénommé Alan en hommage à Alan Turing, ce passage m’avait vraiment marqué. L’idée de voir le destin incroyable de ce héros-inconnu sur grand écran me faisait donc très envie.

« Imitation game » raconte comment un jeune mathématicien à l’intelligence hors-du-commun mit toute ingéniosité et son énergie au service du MI6 entre 1939 et 1945 pour ne remplir qu’une seule et unique mission : décoder le système de cryptage quasi inviolable des nazis ENIGMA. Alan Turing fut le seul à comprendre que pour décoder une machine aussi parfaite qu’ENIGMA, il ne fallait pas un cerveau humain mais une autre machine. En réussissant à construire et à faire fonctionner cette machine, il rendra possible la victoire des Alliés et donnera naissance à l’informatique. Pourquoi Alan Turing n’est il pas dans tous les livres d’histoire ? Parce qu’on l’a réduit au secret dés 1945 et que, homosexuel à une époque où il ne fallait surtout pas l’être, il sera poussé au suicide à l’âge de 41 ans par un traitement hormonal ignoble.

Je ne vais pas aller par quatre chemins, moi, j’ai beaucoup aimé « Imitation Game » et je suis très heureuse aujourd’hui d’avoir vu ce film. On pourra toujours m’opposer que c’est un biopic de plus qui répond aux codes du genre, çà ne ternira pas l’excellent impression que j’ai eu en quittant cette salle de cinéma. Débarrassons-nous d’emblée des petits défauts de ce film. Effectivement, il n’y a rien de cinématographiquement révolutionnaire dans la réalisation et dans le scénario d’ «Imitation Game », ce n’est pas un film techniquement sublime réalisé par un surdoué du cinéma. Ca répond effectivement aux codes du genre, la musique souligne les scènes clefs, le scénario oscille en permanence entre trois époques avec des allers et retour fréquents (ce qui est une construction narrative très à la mode), la réalisation est très académique, le rôle du Turing est clairement ce qu’on appelle (avec un poil de snobisme) un « rôle à Oscar ». Mais vous savez quoi, tout çà moi je m’en suis foutu parce que j’ai accroché à ce film des la première minute, parce qu’il dure 2h et m’a paru passer à toute vitesse, parce que j’ai trouvé Turing hyper attachant, parce que j’ai tout compris alors que je suis loin d’avoir la fibre scientifique, parce que cette histoire est passionnante, tout simplement ! Voilà un film réalisé très efficacement par un réalisateur quasi-débutant, qui construit un film lisible, rythmé juste comme il faut. Il inclut des petites vignettes très courtes d’images d’archive de guerre tout au long du film pour bien rappeler que pendant que Turing fait turbiner sa machine, des gens meurent par milliers et que le temps presse. Il offre à Benedict Cumberbatch, acteur génial, un rôle parfait pour lui, le rôle d’un homme presque écrasé par sa propre intelligence, un homme asocial, cartésien jusqu’à l’absurde, terriblement seul, terriblement triste. C’est marrant, à plusieurs reprises je me suis surprise à comparer Alan Turing à Lisbeth Salander (« Millenium ») et à me demander s’il ne souffrait pas lui aussi du syndrome d’Asperger ! Cumberbatch est parfait, dans les dix dernières minutes il est même déchirant. A ses côtés, Keira Knightley est pour une fois très bien (je dis « pour une fois » parce que je suis ne suis pas fan du tout de cette actrice !) et tous les seconds rôles, bien qu’un peu « écrasés » par le rôle titre, le sont également. Mais ce qui fonctionne le mieux dans « Imitation Game », c’est l’histoire de Turing et, à travers lui, le décodage d’ENIGMA. Ce n’est pas pour rien qu’à mes yeux, la scène la plus forte du film est celle où ils comprennent tous par quel subterfuge simplissime ils vont réussir à décoder l’indécodable ! Et le plus fort, c’est que c’est tellement bien amené par le scénario qu’on comprend nous aussi immédiatement et presque en même temps qu’eux ! Je ne vais rien dire ici de ce subterfuge enfantin (et sacrément ironique et symbolique, quand on y pense…) pour vous laisser le plaisir de vous taper le crâne devant l’écran en vous disant « Oh bon sang ! Mais évidemment... ! ». Sans Turing et sa machine, il apparait aujourd’hui que la guerre aurait duré deux ans de plus, causant la mort de millions d’hommes et femmes supplémentaires. Mais sans Turing et sa machine, aurions-nous tous un ordinateur à domicile ? Sans Turing, pas d’Informatique, pas de conquête spatiale, pas d’ordinateur pour décrypter le génome humain et guérir les maladies, pas d’Internet. Ou alors avec combien d’années de retard ? Et des années, combien en a-t-il fallu à l’Angleterre pour réhabiliter un homme si brillant qu’on a voué aux gémonies juste parce qu’il était homosexuel ? Il y a quelque chose de tragiquement symbolique dans le destin de Turing : son intelligence vint à bout de la violence de la guerre mais elle fut au final terrassée par la bêtise et les préjugés. Il fut la preuve parfaite qu’il est plus facile de gagner une guerre que de vaincre la connerie humaine.

Le film ne le dit pas mais je ne résiste pas la tentation de préciser que Turing s’est donné la mort à 41 ans en mangeant un petit morceau de pomme préalablement imbibée de cyanure. Une pomme à laquelle il manque un tout petit morceau, çà ne vous dit rien ? Que tous ceux qui lisent cette critique sur un Mac regardent au dos de leur bécane…

http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19550242&cfilm=198371.html

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