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Un point c'est (pas) tout

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Critique cinéma : En Fanfare

Publié par Christelle Point sur 30 Novembre 2024, 15:44pm

En attente d’une greffe de moelle osseuse pour traiter sa leucémie, le célèbre chef d’orchestre Thibault Desormeaux découvre à cette occasion que, non seulement il est un enfant adopté mais qu’en plus, il a un frère. Adopté séparément dés l’âge de 3 ans, Thibault et Jimmy n’ont presque rien en commun : l’un a été accueilli par une famille bourgeoise et l’autre par un couple d’ouvriers du Nord.  La vie des deux frères est aux antipodes l’une de l’autre mais quelque chose les réuni : la Musique.

Le long métrage d’Emmanuel Courcol, avec son affiche, sa bande annonce et le pitch qui va avec, pourrait facilement passer pour une comédie comme le cinéma français en propose beaucoup (trop) : une sorte de  « film de potes » où deux hommes qui n’ont rien en commun doivent apprendre à se connaitre pour s’apporter l’un l’autre, en dépit de leur différences. L’un va revenir à la vraie valeur des choses (le riche) et l’autre va prendre conscience de sa propre valeur (le pauvre). Des films comme çà, on en a déjà vu à la pelle. Mais « En Fanfare » cache son jeu, car le propos ici est plus lourd et plus tragique qu’on ne l’imagine. Emmanuel Courcol propose un film qui ne manque pas d’humour mais qui le dose de manière homéopathique, car sur le fond le propos est tragique. Le long métrage  dure 1h45, passe très bien et nous met surtout de la musique plein les oreilles quasiment sans discontinuer. Concernant la partie classique, on nous offre Mozart, Verdi, Ravel, Beethoven ou encore Mendelssohn et la partie plus moderne n’est pas en reste avec notamment Charles Aznavour, Miles Davis ou même Dalida. Si « En fanfare » est un film réalisé de manière académique et efficace, le bonheur d’être immergé de musique compense largement ce classicisme. Comme je l’ai dit, le propos est plus sombre, plus grave que je ne l’avais imaginé. Sur fond de fraternité contrariée, le film évoque descente aux enfers des entreprises du Nord de la France, le déterminisme social (dont le moins que l’on puisse dire est qu’il saute aux yeux), la maladie, la mort et la solitude. Le scénario ménage ses effets car le drame se cache dans les détails, il surgit quand on ne l’attend plus et il est très difficile le de ne pas avoir le cœur serré et les larmes aux yeux pendant les dernières minutes du film. Dans le film de Courcol, les miracles n’ont pas lieu, les personnages ne font pas d’énormes bonds en avant dans leur vie à la faveur des évènements, tout à plus quelques petits pas. Les deux frères n’ont pas grand-chose en commun. Thibault est un grand chef d’orchestre, qui vit seul dans un très bel appartement mais voyage sans cesse à travers le monde, il n’est pas marié (a-t-il seulement des amis ?), il a eu une enfance dorée dans une famille aimante et bourgeoise. Jimmy travaille dans une cantine scolaire, il est divorcé et ne voit plus beaucoup sa fille, il vit chez sa mère adoptive. Lui aussi a eu une famille aimante (pas de misérabilisme excessif : merci !), mais le bon ticket, ce n’est pas lui qui l’a tiré. Tout ce que le premier pourrait dire, faire, penser ne compensera jamais cette différence de départ. Toute tentative de l’aider peut vite passer pour de la condescendance, de la maladresse et ce en dépit de sa bonne volonté. Reste la Musique, le chemin le plus court entre les deux frères. Les deux ont l’oreille absolue. Sans le savoir ils aimaient la même musique, étaient émus par les mêmes notes et c’est dans les moments où ils parlent musique, où ils écoutent de la musique qu’ils sont le plus proches. Sur le papier, cette idée de deux frères très différents que seule la musique peut réunir est formidable. J’ai apprécié que le scénario n’enferme pas Thibault dans une musique classique cérémonieuse et intellectuelle en lui opposant la musique populaire de Jimmy : Ce n’est pas Mozart vs Sardou ! Les deux aiment le jazz, les deux sont émus par un Adagio, les deux  chantent de bon cœur « Emmenez-moi » de Charles Aznavour ou se trémoussent sur du Dalida. Le film doit énormément à un duo d’acteur épatant qui voit se rencontrer un Benjamin Lavernhe émouvant et un Pierre Lottin tout en retenue. Si on voulait caricaturer, on pourrait dire que c’est la rencontre inattendue et reussie entre la Comédie Française et les Tuche ! Lavernhe est parfaitement crédible en chef d’orchestre, il n’en fait pas des tonnes et je le trouve très sobre. Pierre Lottin continue d’élargir sa palette et s’éloignant enfin des rôles de petites frappes pour tendre vers autre chose, plus de douceur, plus de complexité, avec ici une vraie part d’émotion. « En Fanfare » n’est pas un film inoubliable ni un chef d’œuvre, mais c’est un beau moment de cinéma avec un très beau duo d’acteur et un scénario d’une densité et d’une profondeur qu’on n’avait pas forcément vu venir : une bonne surprise.

La bande annonce de "En Fanfare"

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