Le coin des livres : Le Grand Test

Dans une toute petite ville du Berry, un homme a été assassiné. C’était un petit notable du coin, unanimement détestable et détesté, et c’est Alphonse Meunier qui a d’abord été mis en cause par la gendarmerie. Alphonse, c’est un pauvre type lui aussi peu populaire, ancien souffre-douleur de ses camarades, il fait office de coupable idéal. Gardé à vue puis incarcéré, il est rapidement libéré pour manque de preuve, et toute la ville le regarde désormais comme l’assassin. Comme une empreinte a été retrouvée sur la supposée arme du crime, la Gendarmerie a convaincu le juge d’organiser un grand test pour relever toutes les empreintes des habitants, sans exception. Ce grand test, prévu sur 3 jours, rend particulièrement nerveux trois amis d’enfance : Virginia, Maxence et Alexandre.

D’habitude, je ne suis pas avare d’éloges sur le travail de Jacques Expert que je suis depuis quelques années. Mais avec « le Grand Test », j’avoue avoir eu un peu plus de mal que d’habitude. Non pas que le style efficace de l’auteur se soit perdu en route, mais je trouve d’abord que ce roman surfe sur la même dynamique que son précédent « Qui ? » : un petit groupe de personne se soupçonne, se déchire sur qui va être confondu. Ici il ne s’agit pas de savoir qui est impliqué (on le sait quasiment d’emblée) mais qui va être mis sur le grill par la Gendarmerie et si il (ou elle) va balancer les autres ou bien tout prendre sur lui (ou elle). Ensuite, je les ai trouvés d’emblée antipathiques, ces trois « amis » dont l’amitié se fissure vitesse grand V devant la trouille d’être identifié. Ils ne mettent pas longtemps à se manipuler, se trahir et se surveiller, leur soi-disant amitié « à la vie à la mort » ressemblant quand même beaucoup à une amitié en carton. Parallèlement à cette histoire d’amitié fracturée, une seconde cohabite dans le roman entre le directeur d’enquête de la Gendarmerie le Capitaine Duquennes, et le juge d’instruction de Bourges Michel Vial. Ils s’apprécient beaucoup au début du roman, se tutoient et s’invitent les uns chez les autres, à la fin ils se vouvoient et se tirent dans les pattes. Ici, c’est le carriérisme qui est en cause : le premier veut la vérité, le second veut un coupable « facile » et une enquête terminée. Même si le roman se laisse suivre sans déplaisir et que l’on voudrait bien savoir qui va se retrouver piégé par le très intuitif Capitaine Duquennes (qui ferait un bon mentaliste), ce roman policier ne me laissera pas le souvenir fort de certains romans noirs de Jacques Expert. S’il y a des aspects plutôt bien vus (la collaboration difficile Gendarmerie/Justice, la rivalité Gendarmerie/Police, le poids de la rumeur publique), je n’ai pas été follement emballée par « Le Grand Test »