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Un point c'est (pas) tout

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Blog sur tout ce qui rend la vie plus chouette...


Le coin des livres : Propriétés Privées

Publié par Christelle Point sur 8 Octobre 2020, 15:23pm

Avec « Propriétés Privées », Lionel Shriver nous offre 12 nouvelles reliées par un joli un fil rouge : la propriété au sens très large du terme. Au fil de ces 12 nouvelles se dessine une notion qui va bien au-delà de la simple possession des objets ou des bâtiments. Il est ici question de cette possession-là, bien entendu, mais aussi de la jouissance d’un pouvoir, d’une position. Dans « Propriété Privées », on possède, on convoite, on combat pour conserver, bref, on conjugue le verbe « avoir » de toutes les manières possibles. Le défaut inhérent aux recueils de nouvelles, c’est l’irrégularité et ce livre ne fait pas exception. Certaines nouvelles sont fortes et auraient même pu donner lieu à un roman entier, d’autres au contraire sont plus anecdotiques, un peu plus décevante au final aussi. Et cela n’a pas grand-chose à voir avec leur taille. Les deux nouvelles les plus longues, celle qui ouvre le livre et celle qui le termine, sont très chouettes mais souffre du même défaut, elles mettent un temps infini à démarrer et ne devienne enthousiasmante que dans leur seconde moitié, ce qui est quand même dommage. La petite expérience que j’ai des romans de Lionel Shriver (« La famille Mandible 2029-2047» et « Il faut qu’on parle de Kevin ») me fait dire que c’est un petit défaut habituel : les (un peu trop) longs démarrages ! Parlons un peu du fond en commençant par les nouvelles les plus fortes. « Repossession » est une nouvelle courte que n’aurait pas renié Stephen King, l’histoire d’une maison hostile qui se révolte contre sa nouvelle propriétaire. « Terrorisme Domestique » est sans doute ma préférée, une histoire de « Tanguy » qui refuse de quitter le nid familial, une histoire à la limite du surréalisme qui n’est pas sans rappeler celle de «Il faut qu’on parle de Kevin », en moins sombre et en plus drôle. Il y a aussi la nouvelle de fin, « La sous-locataire », où une jeune américaine découvre qu’elle à sous-loué son appartement de Belfast à une compatriote qui s’avère être une souillon doublée d’une sans-gêne, ce qui va souvent de paire : l’idée que je me fais du cauchemar ! Certaines nouvelles sont moins fortes tout en restant fort agréables à lire et pertinente au regard du thème, comme « Les Nuisibles » (à vous dégoûter d’acheter un appartement avec votre chéri!) ou encore « Paradis et Perdition» où un escroc retiré sous les tropiques n’en peut plus du confort et de l’oisiveté de sa cage dorée et envisage sérieusement de se rendre pour être emprisonné dans une vraie prison. Preuve par l’absurde que la propriété, parfois, ça nous aliène plus que ça ne nous libère ! La nouvelle d’ouverture, très emblématique du thème, « Le lustre en pied» (titre étrange s’il en est) raconte l’histoire d’une longue amitié (un peu amoureuse sur les bords) homme-femme qui se brise. Lui se fiance sur le tard et sa promise, dont il est très épris, ne supporte pas son amie de toujours (et réciproquement) ; elle lui met le marché en main : « C’est ton amie de 20 ans ou moi ? ». Lorsque la rupture amicale douloureuse est consommée, les objets (en l’occurrence un cadeau, une œuvre d’art très bizarre) deviennent le réceptacle de toutes les rancœurs et de tous les conflits mal digérées. Je ne peux que recommander «  Propriétés Privées », en dépit de ses petits défauts, qui nous interroge tous sur nous-même et notre propension à vouloir posséder en général. Au-delà de ce recueil, Lionel Shriver se place définitivement dans le trio de tête de mes auteurs anglo-saxons préférés. Faites un (tout petit) effort pour découvrir son travail, sa pertinence et la force féroce de sa plume, vous ne le regretterez pas.

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