En février 1980, le sémiologue mondialement connu Roland Barthes meurt à Paris, renversé par une camionnette. Il sortait d’un déjeuner chez François Mitterrand, et le président Giscard se dit qu’il y a peut-être matière à créer des ennuis à celui qui sera son principal adversaire. Il mandate le policier Bayard, un vieux briscard à l’ancienne, pour enquêter dans un milieu universitaire. Bayard est perdu au milieu de ces universitaires gauchistes, il leur pose des questions simples et ils répondent systématiquement compliqué ! Il s’adjoint alors, un peu par la force, les services de Simon, un thésard en sémiologie. Ce drôle de binôme, que tout oppose, acquiert vite la conviction que Roland Barthes a été assassiné parce qu’il détenait « La Septième Fonction du Langage », une fonction qui permettrait à n’importe qui de convaincre n’importe qui à coup sur. Retrouver ce document ô combien convoité, c’est retrouver le commanditaire de l’assassinat. Le titre du roman de Laurent Binet peut effrayer, et pourtant, en embarque immédiatement dans une aventure rocambolesque digne de Tintin. On y trouve des courses poursuites à pied, en voiture, et même en gondole, des agents secrets qui tuent avec des parapluies empoisonnés, des concours d’éloquence où on mutile les perdants, des Japonais en Fuego, et j’en passe ! On y croise aussi des tas de personnes connues, Michel Foucault, Philippe Sollers (que je ne pourrais plus regarder du même œil!), BHL, Jack Lang, Laurent Fabius, Giscard D’Estaing et beaucoup d’autres. Dés qu’ils apparaissent dans le récit, on sent que Laurent Binet trempe sa plume dans le vitriol, plus ou mois dosé, bien peu en sortiront intacts ! Bon, on ne va pas se mentir non plus, le roman tire en longueur (le passage aux USA, long, un peu abscons est le ventre mou de l’intrigue), si certains passages sont passionnants, si d’autres sont drôles, édifiants, plein de mauvais esprits, quelques autres sont trop complexes. Les notions abordées sont quand même difficilement compréhensibles par un néophyte, même quand Laurent Binet essaie de les rendre intelligibles. La sémiologie, c’est l’étude de la communication verbale et non verbale, ce sont quand même des notions délicates à comprendre, à manier et à mettre en perspective pour le lecteur lambda. Il faut un peu s’accrocher, mais ça vaut le coup car certains passages (les concours d’éloquence notamment) sont assez incroyables à lire. Le roman est très érudit, comme toujours avec Laurent Binet, c’est le quatrième roman que je lis de lui et j’aime beaucoup son style répétitif, ironique et détaché, comme s’il s’adressait à nous directement. « La Septième Fonction du Langage » ressemble assez, dans son style, à « HHhH », l’humour en plus. C’est un roman exigeant et passionnant, érudit et rocambolesque, un double grand écart (très) audacieux.
Le coin des livres : La Septième Fonction du Langage
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article