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Un point c'est (pas) tout

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Blog sur tout ce qui rend la vie plus chouette...


Le coin des livres : Vox

Publié par Christelle Point sur 17 Mai 2020, 15:51pm

Le postulat de départ de « Vox » est presque celui de « La Servante Ecarlate » : à la faveur d’une crise politique, un gouvernement théologique d’inspiration évangéliste prend le pouvoir à Washington et décide de remodeler la société américaine selon ses valeurs mortifères et clairement fascisantes. Ici, le Président Myers n’est que le pantin du Révérend Carl. Pour lui, la voie de la Pureté passe par la soumission totale des femmes à qui on a interdit de travailler, d’avoir un compte bancaire, et puis à qui on a interdit de parler, d’écrire, et même de communiquer entre elle grâce à des signes. Et gare à celles qui se rebellent ou qui sortent du rang ! Pour les contrôler, on a installé à toutes les femmes, toutes les adolescentes, toutes les petites filles un bracelet qui leur autorise 100 mots par jour, pas plus : au delà, elles reçoivent des décharges électriques  de plus en plus puissantes. Autrefois chercheuse en neuroscience, Jean est aujourd’hui reléguée chez elle, à élever ses 3 fils et sa fille et à faire la popote. Elle enrage, Jean, mais bientôt le destin va lui offrir une opportunité de retrouver temporairement sa voix, et surtout de s’infiltrer au cœur du système, dans le secret espoir de le faire imploser. Comme toutes les dystopies, il n’est pas facile de déterminer si le propos de « Vox » est crédible, le roman emprunte la voie royale qu’à ouvert Margaret Atwood et surtout son adaptation TV avec « La Servante Ecarlate ». Si le postulat de départ est le même, le récit est différent et la bonne idée, c’est de  replacer la parole et le mot au cœur de l’intrigue, et d’imaginer qu’ils soient drastiquement rationnés, pour nous toutes. Pas juste le mot parlé mais tous les mots : nous serions toutes prisonnières de nous même. Si on excepte une fin un tout petit peu brouillonne, le roman fonctionne très bien, il se lit facilement, et on ne sait pas, jusqu’à la toute fin, si les choses vont finir bien, très mal ou un peu des deux. L’évolution des personnages, notamment des personnages masculins, est très intéressante car beaucoup d’entre eux sont loin d’être monolithiques, la perception que l’on a d’eux varie au cours du roman, on les fait trop vite entrer dans des cases et on est surpris de voir qu’ils sont bien plus complexes que prévu, c’est toujours intéressants de dessiner des personnages complexes, surtout quand le propos de base est très binaire comme ici. Il y a beaucoup de flash back, surtout au début mais c’est suffisamment clair pour que le puzzle de mettent en place facilement, et clairement. La fin est un tout petit peu confuse, il se passe beaucoup (trop ?) de chose en très peu de chapitres comme dans un film d’Hollywood mais ce n’est pas bien grave. Sur le fond, sans être scientifique, on ne peut que trouver angoissant cette théocratie ultra moderne dans ses méthodes, mais archaïques sur le fond, et on frémit quand on découvre, au milieu du roman, quel dessein secret le Révérend Carl poursuit. A partir de ce moment là, une sorte de point de bascule du récit, on entre dans autre chose qu’une simple dystopie misogyne, on flirte presque avec la science fiction. J’ai bien aimé « Vox » sans lui trouver toutefois les mêmes qualités que « La Servante Ecarlate », probablement parce qu’il arrive en second, qu’Atwood et la télévision ont mis la barre très haut. Mais cela reste un moment de lecture passionnant et pertinent qui insiste sur le pouvoir de la parole, le pouvoir des mots comme arme contre l’ignorance, une arme largement aussi efficace d’un fusil d’assaut.

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