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Un point c'est (pas) tout

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Critique cinéma : Duelles

Publié par Christelle Point sur 8 Mai 2019, 14:45pm

Dans une banlieue tranquille des années 60, une maison mitoyenne abrite deux couples, Alice et Simon d’un côté, Damien et Céline de l’autre, en apparence unis et heureux, dont les deux garçonnets sont amis. Mais le bonheur des deux familles va voler en éclats lorsque Maxime, un des deux enfants, se tue accidentellement. La douleur de Céline et Damien va doucement se muer en une rancœur sourde contre ces voisins qui eux, ont toujours leur fils. Rapidement, entre paranoïa et rancune, Céline et Alice ne savent plus partitions elles jouent.

La seule et unique raison qui m’ont poussé vers ce thriller franco-belge, c’est qu’il s’agit de l’adaptation d’un roman noir que j’ai beaucoup aimé, « Derrière la Haine » de Barbara Abel, et dont je me dis depuis longtemps qu’il est taillé pour le grand écran. Forcément, vu que j’avais encore bien le roman en tête, je ne peux pas avoir vu « Duelles » de la même façon qu’un spectateur qui découvre l’intrigue, c’est évident… Pour le dire vite, je savais d’emblée comment cela était censé finir. Mais qu’importe, ça me plaisait de voir enfin sur l’écran cette histoire d’amitié qui se mue en une haine sourde et implacable, un vrai thriller psychologique. Pour une raison que j’ignore, l’action est transposée dans les années 60, alors qu’objectivement cela n’apporte pas grand chose au propos. Cela donne l’occasion aux décorateurs de faire une jolie reconstitution à base de mobilier géométrique, de robe chasubles avec bandeaux pour les cheveux assortis et de permettre aux protagonistes de griller une clope dés que leur nerfs sont à bout, ce qui va beaucoup arriver. Le temps béni des 60’s, où les hommes travaillaient et les femmes restaient à la maison, toujours élégantes et bien mises, ces 60’s phantasmés m’ont toujours laissé dubitative. Ici, c’est tellement ultra-60’s que ça en sonne presque faux ! La réalisation est intéressante, il y a chez Olivier Masset-Depasse une visible volonté de bien faire, d’utiliser le flou, de jouer avec l’ombre et la lumière, de faire des plans soignés. Mais cette application est un peu gâchée par une musique envahissante et sans grand intérêt, qui appuie les effets au centuple, ou en tout cas bien au-delà du nécessaire ! Le casting est intéressant, les deux actrices jouent plutôt bien leurs partitions avec une mention spéciale à Anne Coesens, plus subtile et dont le jeu est plus retenu que sa consœur Veerle Baetens. Cette dernière, lors des scènes où elle est censée s’abandonner à la colère, surjoue un peu et son accent flamand devient si fort que cela parasite la scène. C’est un peu dur de lui reprocher cela, j’en conviens parce dans l’ensemble, elle fait le job. Les deux hommes, Mehdi Nebbou et Arieh Worthaler, ont des rôles un peu sous –écrits et c’est dommage. C’est dommage surtout pour le rôle de Damien, le père éploré, que le film traite quasiment comme une anecdote alors que dans le livre de Barbara Abel, son rôle est ô combien crucial. L’adaptation d’un roman à suspens est toujours délicate, il y a un monde entre le livre et l’écran. Lorsqu’il s’agit d’un roman qui a très bien marché comme celui-ci (les amateurs de romans noirs le connaissent et si ce n’est pas le cas, il faut aller dare-dare dans une librairie), c’est encore pire puisque tous ceux qui l’ont lu vont avoir leur mot à dire que le film, alors même qu’ils savent d’emblée comment cela doit finir. Jusqu’à ses 20 dernières minutes, le film est assez fidèle au roman, je le reconnais, à part quelques écarts sans conséquence. Si on ne connait pas le livre, on peut se laisser emporter par ces deux femmes. La première est tout d’abord écrasée de chagrin puis semble se reprendre, retrouver un certain équilibre avec la présence de ses voisins et de leur fils Théo. Mais on n’arrive jamais à lire cette femme derrière son sourire timide et ses manières polies, grâce à la bonne composition de l’actrice Anne Coesens. La seconde se sent coupable de l’accident, d’une certaine façon, et comme elle a un passé compliqué en matière psychique, elle ne sait plus si elle a raison d’être sur ses gardes ou si son esprit lui joue des tours. Jusqu’à 20 minutes de la fin, le suspens peut marcher et le film se laisse suivre sans déplaisir. Les 20 dernières minutes, quant à elles, trahissent quelque peu le roman. Là où Barbara Abel, pour un résultat quasi identique, déployait de la subtilité et de la lenteur, Olivier Masset-Depasse fonce tête baissée et lorgne davantage vers les thrillers américains au dénouement spectaculaire. Je ne veux pas exagérer non plus, les deux voisines ne sont pas s’affronter à coups de couteaux dans une cave mal éclairée, il ne faut pas caricaturer. Mais quand même, la fin est précipitée et lorsque la vérité est enfin connue à l’écran, le film perd beaucoup en pertinence et en intérêt. Du coup, on a l’impression d’avoir passé 1h40 devant un téléfilm de l’après –midi sur M6 plutôt que devant l’adaptation d’une excellent roman qu’on a adoré et qu’on a eu un mal fou à lâcher. J’imagine que c’était le prix à payer pour que le film réponde aux code du genre au cinéma, c’est quand même dommage. En conclusion, si l’on a pas la possibilité ou l’envie de lire le roman, on peut éventuellement passer un bon moment devant « Duelles », mais si on l’a aimé et qu’on à tremblé en le lisant, on ne peut que rester sur sa faim devant cette adaptation lisse, aseptisée et simplifiée.

Un truc quand même me laisse très dubitative, le titre « Duelles » au pluriel, pourquoi au pluriel ? C’est d’autant plus étrange que Barbara Abel a écrit un roman qui s’intitule « Duelle », sans « s », et qui parle de tout à fait autre chose ! Décidément, les subtilités du marketing du cinéma m’échappent encore parfois…

La bande annonce de "Duelles"

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